Papou avait eu un mal fou à me lever en ce samedi matin de janvier. Le docteur avait été d’accord que je dorme à la maison hier soir. J’avais été tout content de rentrer à la maison. Néanmoins, le fait de voir tout le temps du monde commençait à m’agacer.
Les journées se ressemblaient toutes.

Le matin, c’est Linus, mon médecin et psychiatre qui me réveillait. D’un certain côté, j’étais content que ça soit lui : j’étais un peu moins ronchon que d’habitude. On discutait un petit peu avant que je ne m’habille. Je n’avais pas autant de vêtements qu’à la maison ou dans celle que j’avais à Poudlard (quoi que, celle-ci, techniquement, il ne restait plus grand chose à l’intérieur), dans ma chambre d’hôpital. Cela me rendait un peu triste : comment pouvais-je être sûr que je portais les bons vêtements ? J’avais toujours une grande discussion avec mes habits, le matin. Linus n’arrivait pas encore à me faire comprendre que c’était inutile, puisque je partais en uniforme de professeur… Et moi, j’arriverais à dire à toutes ces grandes personnes… un jour… Que j’abandonnerais cet uniforme tout moche contre des vêtements pleins de couleurs. Il y aurait du rouge, du orange, peut-être même un peu de jaune... De temps à autre, je porterais du bleu et du vert… Mais le orange, c’était la plus belle couleur du monde ! Et les couleurs, ça rendait tout de suite plus joyeux que ce noir que tout le monde était obligé de porter à l’école… Bon, bien sûr, il y avait les écussons, les écharpes et, l’hiver, les chaussettes, qui étaient colorés… Mais c’était souvent les élèves qui portaient ça… Je ne comprenais pas l’utilité d’avoir des uniformes tout noirs… Enfin, pour terminer ces premières heures de la journée, Linus finissait par me persuader de m’habiller avant de préparer mes affaires avec une infirmière et d’aller prendre mon petit déjeuner avec les autres patients… De temps en temps, je me rendais plus tôt à l’école pour prendre le petit-déjeuner là-bas. J’étais content quand je prenais mon petit déjeuner autre part qu’à l’hôpital : il était souvent pas très bon… Bon, je l’avoue, le jus de fruits ne valait pas celui qu’on pressait, le pain n’était pas de la dernière fraîcheur, il n’y avait pas assez de beurre dans ces petits rectangles, et je préférais la crème de marron que la confiture (sauf celle de grand-père : la confiture de grand-père, c’était la meilleure du monde !).

Et puis, il était temps que je prenne possession de mes quartiers. Celui ou celle qui m’accompagnait le matin s’assurait que je m’installe correctement dans mon bureau. Nous échangions quelques banalités, certainement pour que l’infirmier s’assure que j’étais dans de bonnes dispositions pour ma journée. Puis, je devais assurer mes cours. Je n’arrivais pas encore à me positionner par rapport à mes élèves. Quand ils étaient gentils et paisibles, ça allait parfaitement bien... Dés qu’ils devenaient un peu turbulents ou qu’ils prenaient un malin plaisir à me tourmenter, je ne savais pas du tout comment réagir… Et je perdais souvent mes moyens… J’avais toujours cette idée dans la tête que peut-être ce que je ferais ne rentrerait pas dans le moule, et cela m’angoissait au plus haut point. Certains cours n’avaient jamais été terminés… Tant pis pour eux… Ou pour moi ! Si j’avais été plus ferme, tout ceci ne se serait jamais passé… Mais je ne voulais froisser personne… Et le monstre que j’étais ne voulait faire peur à personne… Souvent, pendant la pause de midi, Radis venait me tenir compagnie ! Je n’avais pas vraiment envie de rejoindre les autres dans la grande salle. Il m’amenait souvent quelques aliments que j’aimais particulièrement pour que je mange un minimum. On discutait de tout et de rien, on refaisait le monde, on s’exposait nos théories sur divers sujets. De temps en temps, l’après midi, à l’heure du thé, je cherchais Cecil pour discuter avec lui. J’avais promis que je le ferais… pas tout le temps, mais tout de même… Il m’arrivait de ne pas le trouver : je me disais qu’il était occupé, et que je le verrais une autre fois… Mais cela ne me rassurait pas de ne pas le croiser… Même pour dire juste un bonjour et échanger quelques banalités avant que nous reprenions chacun notre chemin. Le reste du temps, je passais à la bibliothèque. Il y avait d’ailleurs un nouveau bibliothécaire… Je ne lui avais jamais parlé… Mais je trouvais qu’il faisait un peu peur avec ses cheveux tout en pagaille, sa cigarette et sa barbe un peu folle… C’était tout dérangé ses poils de la tête ! Je n’aimais pas quand c’était tout dérangé comme ça… Mais, un de ces jours, il faudra bien que j’arrive à lui parler ! Je sais qu’il y a de nouveaux arrivages de livres… je ne sais pas à quel intervalle, mais il y en avait ! Et je suis sûr qu’il serait de bons conseils ! Il devait s’y connaître en livres ! Et puis, peut-être que je pourrais me faire un nouvel ami… On pourrait discuter de livres ! J’espérais que nous trouverions des sujets de discussions sur ces dits livres… Sinon, tant pis, je garderais mes théories pour moi.

Lorsque je rentrais à l’hôpital, je devais passer quelques examens, voir la psychologue, faire mes devoirs de professeur avec Tobby, prendre une douche, me mettre en pyjama, manger dans la salle commune avec les autres patients, et, souvent, faire un jeu de société avec des gens que je ne connaissais même pas avant d’aller dormir dans une chambre que je jugeais froide et sans vie. À une époque, j’avais eu le droit de la décorer mais, aujourd’hui, je n’avais techniquement plus le temps de le faire. Et ça me rendait particulièrement triste. Je détestais cette chambre.

Pour en revenir à nos moutons, Linus m’avait autorisé à rentrer chez moi hier soir. Tobby m’avait accompagné. Nous avions pris le thé ensemble, le temps que papou et maman rentrent de leur travail. Ils étaient arrivés assez tard, et ils s’étaient confondus en excuse, ne pensant pas me trouver là… A dire vrai, ça avait été décidé un peu à la dernière minute, et personne n’avait réussi à les joindre. Je m’étais endormi devant le feu du salon, sur le tapis. Papou m’avait doucement réveillé, et il m’avait accompagné dans ma chambre, où la petite lumière de la nuit brillait déjà ! C’était très important d’avoir la petite lumière ! Tout le monde savait que les monstres de la nuit avaient peur de la petite lumière !

Papou ouvrit les rideaux aux alentours de huit heures, avant de venir me déposer un petit baiser sur le front. Je serrais contre moi Bwabwa, mon lapin crétin peluche, et mon King Kong, une peluche gorille. J’étais en train de faire un rêve où j’étais chevalier et je sillonnais les terres de mon seigneur pour le protéger des envahisseurs. Bizarrement, dans ce rêve, le seigneur, c’était Linus. En revenant peu à peu à la réalité, je me fis la réflexion que, même si j’avais très envie d’être avec lui – encore plus depuis le baiser échanger en décembre – je ne pouvais pas me permettre de le garder que pour moi. Ses enfants avaient besoin de lui. D’un autre côté, leurs relations s’étaient tellement détériorées que je ne savais pas comment faire pour que ça aille mieux entre eux. Je soupirais de tristesse : j’aimerais tellement que ça aille bien pour tout le monde, et qu’on soit tous heureux… Néanmoins, je n’avais pas le droit de leur piquer leur père… Et que diraient-ils s’il le voyait avec moi ? Non, ça ne serait pas sérieux… Vraiment pas sérieux. On ne peut pas rêver d’avoir pire petit ami que moi… Enfin, je ne savais pas ce que voulait dire « amoureux »… Enfin, vaguement… Je savais pourtant que j’aimerais bien vivre toute ma vie avec Linus à mes côtés !

Je finis par me lever, la tête encore dans le pâté. Néanmoins, mon ventre avait faim ! La soupe de légumes d’hier soir, bien que très bonne, avait été un peu légère à mon goût, malgré les tartines de pain grillé et le fromage ! Mon estomac me fit comprendre qu’il avait si faim qu’il pourrait manger tout et n’importe quoi ! J’avais très envie de manger quelque chose de salé ! Par exemple, pain, beurre, charcuterie, fromage ! Ou une omelette de patates ! Je soupirais : si ça ne tenait qu’à moi, je l’aurais fait… Mais je savais que ma concentration était limitée, et qu’il y avait plus de chance que je fasse quelque chose d’immangeable, en plus de mettre en pagaille la cuisine ! Et puis, papou ne voudrait jamais que je mange ça un matin !

On finit par partir aux alentours de dix heures pour le Chemin de Traverse. Maman était partie rejoindre le cabaret pour une répétition de dernière minute. Il semblerait que son assistant se soit blessé, et que son remplaçant soit une vraie quiche. Joshua étant à l’école, je me retrouvais seulement avec papou. En soit, j’étais plutôt content qu’on fasse une sortie que tous les deux. Ce week-end, ils avaient décidé, sur un coup de tête, que nous ferions la galette des rois. Ils avaient invité quelques amis, mais aussi Tobby et Linus, mais uniquement si ce dernier n’avait aucune obligation auprès de sa famille. Je me grattais la tête alors que nous empruntions le passage derrière le chaudron baveur. Je ne comprenais pas vraiment pourquoi on n’allait pas à la boulangerie-pâtisserie de Monsieur Seguin. Papou voulait absolument tester la pâtisserie qui se trouvait sur le Chemin de Traverse : il en avait souvent entendu parler, et il semblerait qu’on ne lui en ait dit que du bien.

Papou sourit. Je ne le savais pas mais il aimait bien ce côté « enfantin » qui faisait parti de mon caractère. Enfin, je ne sais pas si on pouvait le qualifier d’enfantin, mais disons, que je ne prenais pas la tête sur le comment j’allais poser mes questions. Mes pensées étaient assez basiques pour certaines choses… Non, je devais admettre que je tenais plus de l’enfant sur certains dires que de l’adulte. Mais, peu importe ! C’était moi et juste moi. On finit par arriver devant la pâtisserie. C’était une maison londonienne avec une enseigne au-dessus de sa porte. Je fronçais les sourcils.

On finit par entrer. L’intérieur était tout à fait charmant. Et lorsque mon regard se posa sur les vitrines du comptoir, il s’illumina. Un grand sourire apparut sur mon visage. Je courus vers ces dernières, manquant de tomber : je ne savais plus où donner de la tête ! Tout avait l’air tellement bon !

Je me mis à examiner consciencieusement les gâteaux.

Je réfléchis quelques instants avant de dire :

Je regardais bien tout avant de pointer mon doigt vers un éclair à la vanille :

Je plissais les yeux pour mieux réfléchir.

Je me grattais la tête : plus qu’un à choisir avant de regarder pour la galette.

Je passais vite à autre chose. Je me plantais devant les galettes !

Je mis mon doigt sur mon nez et demandais :