Llewellyn avait eu de la chance. Il avait trouvé, Le Livre, Le Bon Moment et L'Endroit Tranquille, tout ça en même temps. La bibliothécaire lui avait indiqué le livre qu'il cherchait, en précisant "A Consulter sur Place, Exemplaire Unique" avec un regard que le garçon avait eu du mal à interpréter. Cependant, la vieille chouette était en place depuis des années, peu de chances qu'elle soit aux ordres de la Matriarche ... à moins d'une personne transformée, comme ils l'avaient vu en métamorphose ... mais bon, à ce compte là, on ne vivrait plus.

Son livre sous le bras, il avait trainé dans le labyrinthe d'étagères de la vaste pièces, toute en coins et recoins, cherchant une table libre, assez à l'écart des autres élèves pour ne pas risquer de problèmes. Il avait fini par trouver un refuge, sous un croisement de planches pleines de livres, derrière un lutrin, ou une sorte de pupitre, il ne savait trop. Il ne serait pas assis, mais la planche de travail au dessus de lui lui assurait une certaine discrétion. De plus, le recoin au fond duquel il se trouvait n'avait qu'un accès, bonne chose pour être averti de l'arrivée d'intrus. L’endroit était certes un peu sombre, mais Llew avait prévu son coup de longue date. Il ne maitrisait pas assez le sort de Lumos, mais il avait collecté, nourri, entretenu quelques lucioles vivantes, dans un bocal en verre, grâce aux astuces d'un camarade.

Quand au moment, quoi de plus favorable qu'un dimanche où malgré le temps, deux Maisons disputaient un match de quidditch endiablé, sous la ferveur et les hourras de toute l'école rassemblée.

C'est ainsi que Llewy, détendu, se perdit dans les méandres abscons et tortueux du verbiage politiquement correct décrivant les étapes alambiquées de la constitution, puis de la prise de pouvoir de l'organe connu de nos jours sous le nom de "Ministère de la Magie"

Rowena avait décidé de ne pas aller au match de Quidditch, afin d'éviter la pluie et la foule, choses qu'elle détestait. Elle avait déjà décidé de son programme : elle irait lire un livre à la bibliothèque. Comme à son habitude.
C'était son endroit préféré à Poudlard. La où elle se ressourçait, c'était là aussi qu'elle se calmait, et le seul endroit où elle pouvait travailler tranquillement.

Perdue dans ses pensées, elle n'avait pas remarqué qu'elle était déjà arrivée devant la grande porte en bois. Elle la poussa et fut plongée d'un seul coup dans une odeur rassurante de vieux livres et de bois.

Les éclairs et le ciel sombre au dehors, obligeant la bibliothèque à être éclairée de faibles lumières, rendaient l'ambiance encore plus calme qu'à son habitude. Rowena tira un peu les manches de son pull sur ces mains, car elle avait froid. Elle commença à avancer afin de trouver une place pour lire tranquillement.

Elle arrivait à un croisement entre deux étagères quand elle entendit un bruit de froissement de page, ce qui l'étonna. Normalement, tout le monde était au match. Surement Madame Pince...

Cependant, en continuant sa recherche, elle vit une faible lueur sortir de sous une table, ce qui l'intrigua. En se rapprochant un peu plus, elle vit qu'il y avait un élève sous celle-ci, qu'elle reconnut comme étant un Serpentard, dont elle ne connaissait pas le nom cependant.

Elle se rapprocha doucement et se baissa d'un coup, puis s'adressa à l'élève :

- Coucou ! Qu'est-ce que tu fais là toi ?

Llewellyn avait bien avancé. Entre le livre "rare" et les deux autres qu'il avait emprunté, il avait assez de données pour se faire une idée assez précise de comment le "Ministère de la Magie" avait pu devenir ce qu'il était.
Il avait quatre parchemins sur lesquels il prenait des notes, dont un où il traçait un organigramme compliqué des fonctions et attributions, des liens de supériorité entre les divers postes. Un travail assez complexe, donc, dans lequel il s'était plongé de toute son âme.
Autant dire qu'il fut plus que surpris quand une tête jaillit entre les étagères, comme un diable à ressort ... mais à l'envers !

- Coucou ! Qu'est-ce que tu fais là toi ?

Un bout d'écharpe rouge et or, une frimousse de première année et une voix de ... fille ! Cela fut suffisant pour que tout le corps de Llew se tende, sauf que ...l'espace disponible ne le permit pas. Dans le même geste, sa main écrasa le fusain avec lequel il prenait des notes, son pied envoya rouler le bocal de lucioles et sa tête percuta, avec un bruit sourd, la planche au dessus de lui. Dans un mouvement convulsif, il tenta de reculer, de s'éloigner du danger qu'il n'avait pas vu venir, et en moins d'un demi-pas, se retrouva tassé contre le mur, une main derrière la tête pour tâter la bosse naissante, les larmes, de douleur surtout, au coin des yeux.

- Rien ! Ze fait rien ! Zuste des ressersses, mais z'ai le droit !

Mais bon sang, que faisait-elle là ? Pourquoi n'était-elle pas comme tout le monde à ce fichu match de quidditch ? Du coin de l’œil, dans la pénombre revenue avec le départ de sa lumière en bouteille, Llewy tentait d'évaluer ses chances de fuite ... bien maigres chances, ceci dit.

A peine Rowena eut baissé la tête, qu'elle assista à un spectacle bien étrange : l'élève en face d'elle renversa son pot de lucioles, se cogna la tête contre la table et se mit à reculer tout en même temps. Cela surprit fortement la jeune fille, et elle se retourna, pour vérifier que personne ne soit derrière elle, au cas ou.

- Rien ! Ze fait rien ! Zuste des ressersses, mais z'ai le droit !

Son zozotement surprit encore plus Rowena. Il ne ressemblait décidément pas aux Serpentard qu'elle avait pu croiser avant. En plus, il se cachait pour lire, et elle ne savait pas que lire était possible chez eux.

- Oh oui, oui, j'ai jamais dit le contraire! Je suis désolée de t'avoir fait peur ce n'était pas dans mon intention (et aussi du fait que tu te sois fait mal par ma faute). Et tu devrais d'ailleurs faire attention, tes lucioles s'envolent.

Rowena adressa un petit sourire quelle voulait gentil à l'autre élève, pour lui montrer qu'elle ne lui voulait pas de mal, bien que leurs deux maisons soient censées se haïr. Cet élève là lui faisait plus ressentir de la compassion et de l'amitié que de la haine, contrairement à la majorité des autres vert et argent.

- Et tu faisais des recherches sur quoi ? Si c'est pas indiscret ? Moi c'est Rowena en passant, et toi ?

Et, dans la continuité de la spontanéité dont elle faisait preuve, Rowena vint s’asseoir face au Serpentard, et commença son livre, sans faire attention à la surprise du jeune garçon. Elle lui lança un regard, et se plongea dans son livre, malgré la pénombre qui s'était réinstallée, et parfois interrompue par le vol d'une des lucioles près d'elle.

Llewellyn était stupéfait ... stupéfait et abasourdi. Autant par le sans-gène de la fillette qui s'installait face à lui, comme si de rien n'était, que par la douleur de son occiput ... et par la fuite de ses précieuses lucioles.
Il lui fallut quelques bonnes secondes avant de comprendre que la gryffondor ne quitterait pas son refuge, et d'accepter le fait qu'il ne pouvait que répondre, au moins partiellement à ses questions.

- Ze ... ze suis Llewellyn, mais tu peux dire Llew ... et ça se prononce Li-ou. Ze sais, c'est un drôle de nom, c'est vieux et c'est gallois.
Tu veux bien me passer mon bocal, sitoplé ? Il est à côté de toi.

Lorsque la rouge-et-or lui eu rendu le récipient, le petit vert-et-argent l’examina précautionneusement, puis sortit de son sac une petite boite en fer, dont il tira des espèces de feuilles brunâtres et séchées qu'il déposa au fond du bocal. Il prit ensuite une petite fiole à bouchon doseur, et versa sur le substrat quelques gouttes d'un liquide aux arômes puissants, presque dérangeant tant il était doucereux. Dans le même temps, il expliquait à la fillette devant lui de quoi il était question.

- Tu sais ... ou pas ? Il faudrait environ 5 000 lucioles normales pour avoir autant de lumière qu'une ssandelle. 7 ! Mais ça tiendrait zamais dans un bocal. 11 ! Et ça serait la misère à nourrir et à garder vivant. 17 !Alors z'ai des lucioles spéciales ...20 ! et un bocal en verre mazique, aussi. 23 ! Et je les nourris de viande sessée, 24 ! et z'ai un élixir pour les attirer; 25 ! Voilà, elles sont toutes là !

Llewy referma son bocal avec un soupir de soulagement. Il le posa entre lui et Rowena, et commença à rassembler ses parchemins de notes, grimaça en voyant la trace laissée par le fusain écrasé, et entreprit de réparer les dégâts, observant du coin de l'oeil l'envahisseuse.

- Mes ressersses, c'est sur le Ministère de la Mazie, son orizine, son fonctionnement, qui fait quoi, qui obéit à qui, tout ça ...

Et toi, ton livre, c'est bien ?

Rowena tournait la page de son livre quand l'élève assit devant  elle lui adressa la parole. Elle apprit ainsi qu'il s'appelait Llewellyn, qu'elle pouvait l'appeler Llew (ce qui se prononçait Li-ou) et qu'il avait 25 lucioles qu'il nourrissait avec de la viande séchée. Elle l'avait écouté d'une oreille distraite, mais avait été marquée par la conviction qu'il mettait dans ses mots en parlant.

- Mes ressersses, c'est sur le Ministère de la Mazie, son orizine, son fonctionnement, qui fait quoi, qui obéit à qui, tout ça ...Et toi, ton livre, c'est bien ?

Rowena releva la tête, et vit l'élève qui regardait sa feuille, barrée par un trait de fusain.

- Moi? Heu oui, mais ce n'est que L'histoire de Poudlard, tu sais. Et toi, tes recherches se passent bien ?

Elle allait replonger la tête dans son livre quand elle se rendit compte qu'elle n'était plus très ben concentrée sur les mots. Elle avait lu trois pages et ne savait même plus de quoi elles parlaient. Elle ferma alors son livre, et releva la tête, afin d'être pleinement dans la conversation.

- Et au fait, pourquoi tu es dans la bibliothèque plutôt qu'au match ? Enfin, je veux dire, c'est pas ta maison qui joue ? Tu devrais plutôt être en train de les encourager non?

Un coup de tonnerre retentit, et Rowena rentra la moitié de sa tête dans son pull. Elle avait froid, mais elle imaginait le froid que devait supporter les autres élèves qui se trouvaient dehors, sous la pluie. Cependant, un cri de joie lui parvint aux oreilles. Elle examina alors l'élève qui avait préféré la bibliothèque au match de quidditch. Il ne ressemblait vraiment pas aux serpentards qu'elle connaissait: déjà, il avait l'air stressé. En suite, il zozotait. Et en plus, il était à la bibliothèque. Tout cela étonnait vraiment la jeune fille.

Llewellyn avait eu un petit hochement de tête en guise de réponse à la question sur l'avancement de ses travaux. Il essaya vainement de faire disparaitre la rature de ses notes, sans y parvenir tout à fait. Il leva ensuite la tête et cligna des yeux à la question suivante de la jeune fille devant lui. Il plissa les lèvres, dans une moue d'intense réflexion, puis fronça le nez, avant de répondre.

- Y'a plusieurs raisons de pourquoi ze suis pas au matss. D'abord, ze suis plutôt de santé frazile, et la pluie glacée est pas très bonne pour moi. Ensuite, ze déteste les balais, le vol sur balais, et tout ce qui s'y rapporte plus ou moins. Et enfin, même si l'entraide et la coopération sont censées être les plus grandes valeurs de la maison Serpentard, mes ... camarades et moi, on s'entend ... pas très bien. Y'en a même qui disent que ze devrait pas y être, dans cette maison, ou dans cette école non plus, d'ailleurs. Alors bon, z'ai pas une folle envie de les soutenir, tu comprends ...

Le garçon se perdit un moment dans ses parchemins, avant de relever la tête, pour interroger à son tour la fille.

- Et toi ? pourquoi t'y es pas, au stade ? Ze croyais que TOUS les sorciers étaient fous de Quidditss ?

Le regard de Rowena se perdait sur les étagères, tandis qu'elle écoutait le serpentard lui répondre. Et c'est bien ce qu'elle pensait, il n'avait pas vraiment l'air intégré à sa maison.

- Et toi ? pourquoi t'y es pas, au stade ? Ze croyais que TOUS les sorciers étaient fous de Quidditss ?
- Je... J'aime pas trop la foule. Et l'extérieur non plus. Je suis plus une fille qui se sent mieux à l'intérieur. Et puis, la pluie, tout ça... Enfin voilà, tu vois ? Et le Quidditch c'est plus vraiment mon truc.

Elle ramena ses genoux à sa poitrine, et les entoura de ses bras. Elle mourrait vraiment de froid là. Mais bon, au moins elle n'était pas dehors.

- Et sinon... Tu fais ces recherches pour un exposé ? Ou pour toi-même?

Elle n'avait pas l'habitude de voir des gens faire des recherches sur le ministère de la magie pour eux-même. En fait, elle voyait rarement des élèves faire des recherches, même pour des devoirs. Et surtout lors d'un jour de match de quidditch. En fait, tout la surprenait concernant l'élève.
Elle fut parcourue d'un frisson, et se leva pour marcher un peu, histoire de se réchauffer du mieux qu'elle pouvait. Elle restait cependant dans le même couloir, histoire d'entendre la réponse de Llewellyn, tout en regardant les différents titres des livres, lisant leurs résumés de temps en temps.

- Tiens ? T'as dit que c'est plus ton truc, ça veut dire que ça l'a été ? T'as eu un accident, ou un truc comme ça ?

Llewy regarda la jeune fille qui lui semblait bien avoir le même âge que lui, même s'il était bien plus petit. Il remarqua alors son frisson, sa façon de resserrer ses bras autour d'elle.

- Tu trembles, tu as l'air d'avoir froid, pourquoi t'as pas mis ta robe de sorcière, c'est parce que c'est Dimansse ? Ze te prêterais bien mon éssarpe, le temps que tu trouves la tienne, mais bon, ze suis pas sur que nos couleurs soient bien vues dans ta maison, les Gryffondors semblent tellement aimer nous détester ...
Sinon, mes ressersses, c'est personnel, c'est pas pour un devoir ... ou plutôt si, mais zenre un devoir de famille, un besoin d'éclaircir l'histoire et de comprendre le sens de mon passé, mais bon ...

Llewellyn eut un geste désinvolte de la main, comme pour chasser un détail importun, et ne se rendit compte qu'à cet instant que la fillette s'était levée et déambulait dans les rayonnages, semblant chercher quelque chose, consultant la tranche de certains livres.

- Tu ssersses quelque ssose de précis ? Ze connais assez bien le classement, ici, et ze pourrais t'aider, si tu veux ..

L'élève entendit vaguement le serpentard lui répondre, mais son esprit était concentré sur l'étalage de livre en face d'elle. Malheureusement, aucun d'entre eux ne lui donnait réellement envie de le lire -ou alors, ça en était un qu'elle avait déjà lu. Et en plus elle avait déjà un livre en cours. Elle retourna donc s'asseoir en face du vert et argent, les yeux dans le vague. Quand elle se reconcentra sur la conversation, elle vit que l'élève la regardait, la tête penchée, l'air d'attendre une réponse.

- Oh, pardon tu m'as parlé ? Désolée, quand je suis face à un livre, j'écoute plus trop les gens. C'est une mauvais habitude, je le sais, parce qu'ils pourraient se vexer (d'ailleurs j'espère que tu ne l'es pas -vexé je veux dire) mais je peux pas m'en empêcher. Parce que bon, si en plus c'est pour parler avec les gens de cette école, merci mais non merci.  

Et sans attendre de réponse aucune, Rowena se plongea de nouveau dans son livre. Soudain, elle se rendit compte de ce qu'elle venait juste de dire.

- Oh pardon, quelle idiote je suis! Je parlais en général, pas de toi particulièrement, faut pas que tu te sentes concerné en tous cas! Mais reconnais quand même que la plupart des élèves sont pas très agréables. Surtout dans ta maison.

Et voilà qu'elle recommençait. Elle critiquait une maison devant un élève qui en faisait partie. Question manque de délicatesse, elle était au top. Elle décida alors de changer de sujet pour ne pas s'enfoncer encore plus.

- Sinon, t'avances bien dans tes recherches ? demanda-t-elle en essayant de faire le sourire le plus gentil et le plus honnête qu'elle puisse trouver.

Llewy observait la rouge et or qui semblait l'avoir oublié. Il la trouvait étrange, même pour une élève de Poudlard, avec cette faculté qu'elle paraissait avoir de passer d'une chose à l'autre entièrement, presque exclusivement, on pourrait dire.
La fillette revint s'asseoir face à lui, sans plus qu'un regard vague pour l'écharpe qu'il tenait en main. Elle se replongea dans son livre, et le petit serpentard commença à remettre le lainage quand la gryffondor reprit la parole.

Et alors, elle lui sortit les pires des énormités, l'une derrière l'autre, sans même y faire attention, comme si ça n'avait pas la moindre importance. LLewellyn, d'abord surpris, finit par en être outré. Il avait commencé à ranger ses affaires dans sa besace, au fil des paroles de son interlocutrice, qu'il avait d'abord pris pour une jeune personne décalée, et qu'il considérait maintenant comme un être dédaigneux, imbue d'elle même. Il crapahuta sous les étagère et se redressa dans l'allée entre les rayonnages. Il se devait de répondre avant de s'en aller !

- Ho oui, ze vois très bien de quoi tu parles. Ze n'ai pas ssoisi cette maison, tu t'en doutes bien, et ze ne suis touzours pas sur d'y avoir ma place ... mais ze pense qu'à toi, elle t'aurait très bien convenue, tu te serais très bien entendue avec Nocta, à vous deux, vous auriez fait une très belle paire ... de pestes !

Après ces mots, le petit Llewy quitta les lieux, secouant la tête, tout déconfit.
Vraiment ! Pas une pour rattraper l'autre !

-Ho oui, ze vois très bien de quoi tu parles. Ze n'ai pas ssoisi cette maison, tu t'en doutes bien, et ze ne suis touzours pas sur d'y avoir ma place ... mais ze pense qu'à toi, elle t'aurait très bien convenue, tu te serais très bien entendue avec Nocta, à vous deux, vous auriez fait une très belle paire ... de pestes !

Rowena en resta bouche bée. Jamais elle n'aurait pu croire qu'on la comparerait avec Nocta. Elle aurait voulu répliquer mais l'élève était déjà parti. Elle se leva alors et lui courut après, au risque de se faire reprendre par la bibliothécaire.

- Hé! T'en va pas! C'est pas ce que je voulais dire.

Quand elle le rattrapa enfin, elle s'arrêta de courir. Le sport, c'était vraiment pas son truc, encore moins dans une bibliothèque. En plus elle avait mal aux pieds. Elle enleva ses chaussures, et se remercia mentalement d'avoir pensé à mettre des collants ce matin là. Elle lui dit alors, confuse, et les chaussures à la main, les excuses qui lui paraissait les plus adaptées.

- Je suis désolée, je voulais pas critiquer ta maison, je sais pas ce qui m'a pris. Enfin, c'est loin d'être une mauvaise maison, en plus mon père y était, et mon rêve d'enfance était d'y aller. Mais j'ai juste dit n'importe quoi, et en plus ça me ressemble pas de critiquer quelque chose comme ça. Alors j'espère que tu vas accepter mes excuses, parce que mon but c'était absolument pas de te blesser ou de te faire sentir mal ou quoi que ce soit. Et en plus, je DÉTESTE Nocta, donc j'espère vraiment que tu vas pas m'en vouloir et/ou continuer à me considérer comme elle.

Rowena lui tendit alors la main droite, ses chaussures toujours dans son autre main, en signe d'excuse et lui fit un sourire mi-figue, mi-raisin.

- On fait la paix ?

Llewellyn était presque plus peiné que vraiment en colère. Cette fille agaçante avait le don pour dire des phrases malveillantes sans même avoir le temps d'y réfléchir, comme si sa langue allait plus vite que sa cervelle. Il était désormais certain qu'avec un tel manque de contrôle, une telle naïveté de langage, elle ne pouvait définitivement pas avoir été élevée au sein du Clan.
Quand elle le rattrapa et tenta de s'excuser, aussi maladroitement qu'elle lui avait parlé auparavant, il se força à s'arrêter et à l’écouter, les bras croisés, comme pour se protéger de tout contact.
Il la laissa mariner, la main tendue, pendant les quelques secondes qu'il prit pour réfléchir, et c'est à voix presque basse, en détachant bien les mots, qu'il lui rendit sa sentence.

- Ce n'était peut-être pas ce que tu voulais dire, mais tu l'as dit quand même. Tu essayes de te zustifier ensuite, mais tes mots ont déza causé leur douleur. Si tu veux vraiment être excusée, il faut que tu apprennes à peser tes paroles, et le sens qu'on peut leur donner, avant de les prononcer. Il va vraiment falloir que tes méninzes se mettent à azir plus vite que ta langue, si tu veux pas qu'un zour un mauvais cousseur te l'arrasse !

Il considéra la main tendu, mais ne s'en saisit pas, et lança une dernière parole avant de quitter ce qu'il avait cru être un refuge, un havre de paix.

- Ze ne suis pas ton ami ... Il va falloir plus que tes piètres excuses pour qu'on fasse la paix. Montres moi des actes, apprends à ne plus blesser les autres, et on en reparlera ...