Samedi matin. Huit heures et quelques. Devant la porte du château. Dehors.

Qu'est-ce qu'il foutait là, déjà ? Michaël n'était plus tout à fait sûr. Il se souvenait avoir été réveillé par un bruit atroce dans la chambre des septièmes années de Gryffondor. Un espèce de ronflement s'approchant plus du grognement d'un animal en rut qu'à un bruit humain. Ce désastre sonore avait réussi à tirer le Préfet-en-Chef de son sommeil - pourtant de plomb. A moins que ce ne fut à cause de son estomac, lui bien réveillé et prêt à en découdre. Ou, autre option : les deux à la fois. Déjà bien plus probable.

Bref, Michaël s'était retrouvé incapable de se rendormir. Du coup, bien qu'aillant la tête dans le cul, il s'était habillé et s'en était allé déguster quelques mets dans la Grande Salle. Chose étonnante, avec cette salle, et les elfes de maisons, c'était qu'elle était toujours pleine de victuailles, le matin. Et ce, à partir de sept heures. Ne serait-ce que pour le personnel de l'école. Bref.  Le Rouquin s'était gavé de plusieurs tartines de confitures diverses, le tout agrémenté de chocolat au lat chaud. 'faut y aller en douceur, le matin, voyez-vous ? Surtout quand il est tôt. Et que vous ne vous êtes pas réveillé à l'heure habituelle.

Cinq minutes plus tard, inexplicablement, il s'était retrouvé dehors. De la neige recouvrait le parc. Il faisait froid. Et dans son état, Michaël n'avait pas songé un seul instant à se couvrir plus que nécessaire. Que voulez-vous, quand on est mal réveillé, on ne réfléchit plus. Rajoutez à ça que Michaël ne réfléchissait déjà pas des masses le matin, en temps normal... Et POUF, ça fait un Mikanou qui se les pèle.

Il faut cependant reconnaître que parfois, le froid a du bon. Par exemple, il permet de se souvenir bien plus rapidement que : on est un sorcier. Qu'on a une baguette magique. Et qu'on sait métamorphoser des pierres et autres objets en couvertures bien chaudes. Ce, grâce à une simple formule apprise durant les premières années à Poudlard. Bon, Michaël aurait éventuellement pu se rappeler qu'il avait des jambes, et que la salle commune avait une cheminée particulièrement chaleureuse. Mais ce ne fut pas le cas, et le Gryffondor se retrouva emmitouflé jusqu'au nez dans une couette bien chaude - et imperméable, grâce à un second sort absolument génial en cas de chute de neige ou d'averse : impervius. Une fois appris, ce sort change votre vie.

Assis sur les marches de l'entrée, Michaël observait d'un œil vide le soleil sortir de sa cachette. Repus, digérant son petit-déjeuné, et amorphe comme un zombie après un banquet de chair humaine, Mika ne se rendit pas compte de la silhouette qui s'approchait assez vite de la porte. Une silhouette qui courait dans un... Chemin déblayé. Une silhouette qui finit quand même par attirer vaguement l'attention du jeune Hawkmoon. Elle s'approchait, encore, encore, jusqu'à arriver à la hauteur du gryffondor. Qui constata soudain qu'il avait affaire à un être humain.

Un gars. Barbu. En fringues pas du tout faites pour supporter le froid et l'humidité. Et qui courrait, tout seul, dans le parc, pour être plus précis. L'avait-il remarqué ? Aucune idée. Mais le Mikanou, il reconnaissait presque l'autre géant. Son nom ? Aucune idée. Sa maison ? Bonne question. Mais il était en septième année, ça, c'était certain. Après tout, Mika se souvenait vaguement avoir vu ce tas de muscle chevelu et sombre en cours. Mais ça, ce n'est qu'un détail.

Donc, alors que le chevelu arrivait à la hauteur de Mika et que celui-ci remarquait vraiment le nouvel arrivant, le rouquin se leva brusquement. Une couette chût dans la neige. Et un Michaël Hawkmoon toujours aussi mal réveillé, mais bien conscient du froid, parla.

« Non mais t'es pas bien dans ta tête toi ! T'as vu l'heure ? Et le temps ?! On s'les pèle, ici, et toi... Toi, tu cours comme si de rien était, alors que tes orteils ont dû se transformer en glaçons !» commença-t-il, n'exagérant pas pour deux mornilles. Il s'approcha du colosse, enfin...Pas trop. Y'avait de la neige par terre. Neige = froid. Froid = C'EY LE MAAAAL. « Qu'est-ce qui t'es arrivé pour que tu prennes une telle décision ? Non mais par Merlin, courir alors qu'il fait... Allez, moins quarante degrés. C'est du suiciiiiiide ! Du. Sui. Cide. T'sais, si t'as des problèmes, tu peux en parler, eh ! Bon, pas à moi, même si j'suis préfet-en-chef et tout et tout, mais... Genre, à l'infirmière. Ou à un des préfets de ta maison. Ou à ta lampe de chevet. J'sais pas, moi ! Mais t'infliges pas un tel traitement ! Non mais... Allez, stop, arrête de courir et retourne au chaud ! »

Il n'exagérait jamais le matin. Jamais. Et surtout pas avec la tête dans l'brouillard, pour être poli. Voyons. Michaël était bien plus digne que ça.

Une couette fut ramassée, secouée, puis recouvrit à nouveau un gryffondor de dix-sept ans. Un gryffondor qui regardait son vis-à-vis d'un air mi-courroucé mi-outré. Non mais vraiment. Courir par ce froid ? Il était complètement fêlé.

Le Géant ignora superbement le Préfet, buvant tranquillement de longues gorgées d'eau, tandis que ce dernier monologuait. Du moins, dans un premier temps. Puis il écouta le Rouquin spéculer sur le devenir de ses glaçons orteils. Cela fait, il éclata de rire. Et pas qu'un peu ! Un véritable rire tonitruant, digne d'un géant ! Ou d'un troll bourré, à voir. Bref, quelque chose avait dû déclencher cette hilarité, bien que Michaël était totalement incapable d'en deviner la cause.

« Es-tu un sorcier frileux ou une simple couverture parlante égarée ? Mes orteils se portent bien, on voit que tu n'as jamais mis les pieds en Bulgarie toi, c'est presque l'été ici comparé à un vrai hiver Bulgare! » fit le colosse, une fois calmé.

Le grand brun fit alors ses lacets, comme si de rien n'était, alors que le Mikanou poursuivait son discours passionné. Et lorsque le sportif se redressa, à la fin dudit discours, il adopta une posture méprisante. Toisant son interlocuteur de toute sa hauteur, le regard froid et d'un ton pas engageant pour deux sous, il reprit.


« Écoute garçon, si tu préfères rester tranquillement au chaud ça ne tien qu'à toi, mais fous-moi la paix okay ? J'ai autre-chose à faire que de me justifier auprès d'un Gryffondor mal peinturluré qui me conseille de parler a ma lampe de chevet... »

Une personne normalement constituée aurait au moins été vexée par ses propos. Mais pas Michaël. Entre autre, parce que la plupart des paroles du brun lui passèrent littéralement par-dessus la tête. Par exemple, de la première remarque du Colosse, Michaël n'avait retenu que "mes orteils se portent bien". De la seconde, "Ecoute, si tu préfères rester [...] au chaud ça ne tien qu'à toi". Le reste, niet. Rien. Nada. Juste un coup de vent sifflant légèrement à ses oreilles.

Nous mettrons ce manque d'attention sur le compte du froid combiné à la fatigue. Merlin sait à quel point un cerveau et des oreilles peuvent être sélectifs ralentis en cas de matinée à moins sept-cent degrés. Quoiqu'il en soit, Michaël ne fut pas le moins du monde offensé par les paroles de son interlocuteur. Haussant un sourcil, il regarda ce dernier s'éloigner en courant.

« Il est vraiiiiiment pas net, ce gars. J'devrais p't'être contacter Sainte-Mangouste. Ou l'infirmière. Voire le directeur... Ou bien les trois. Ouais, les trois, c'est une bonne idée ! » commenta le Tatoué. Puis, haussant cette fois les épaules, toujours enroulé dans sa couette, il s'éloigna. Chaud. Il fallait retourner au chaud ! Cependant, cet empressement ne l'empêcha pas le moins du monde de lâcher un dernier commentaire. « Roh puis qu'il se démerde, eh. 'pas mon problème. Qu'il vienne pas se plaindre après s'il perd un orteil, une oreille, ou un bras à cause du froid. Je l'ai prévenu ! »

Oui, il arrivait parfois que Michaël se mette à parler tout seul. Mais que voulez-vous, faute d'avoir un interlocuteur, on fait avec les moyens du bord ! Bref. Retournant à sa salle commune, Michaël se demandait tout de même s'il allait revoir le Colosse. Techniquement, c'était plus que probable ! Après tout, comme dit précédemment, Michaël avait la vague impression d'avoir vu ce gars en cours avec lui. Il était juste incapable de dire quels cours en question. Mais vraiment, le rouquin voulait revoir, ou apercevoir, ce type.

Histoire de savoir s'il lui manquerait, oui ou non, un orteil. Ou une oreille. Ou un bras. Qui sait ce qui peut arriver, ou ce qu'on peut perdre à cause du froid !

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