Cecil sentit quelque chose se fermer dans le regard d'Amun quand il lui répondit. Il ne dirait sans doute rien de plus. Cecil ne voulait pas le mettre dans l'embarras, d'autant plus qu'il l'avait vraiment aidé. Il dit seulement d'une voix douce.

"Je comprends."

Puis son temps changeant. Cecil essaya de détendre l'atmosphère, et bien qu'il se sente encore engourdi, il s'étira en soupirant.

"Pourrais-tu aller me chercher ma baguette, s'il te plait? On va s'occuper de cette armoire."

"Conseil d'un vieux professeur, il faut toujours avoir sa baguette sur soi. Regarde où ça m'a mené de l'oublier."

Cecil prit sa baguette qu'Amun lui tendait. D'un geste sec, il lança le sortilège de réparation. En un instant, l'armoire fut comme neuve, et les livres, en un ballet poussiéreux, se remirent en place sur les étagère. Dans un grincement final, les portes se fermèrent. Cecil essaya de se relever. Il eut un vertige, chancela et se rattrapa sur l'épaule d'Amun. Les jambes de Cecil le portaient à peine et il sentait encore dans ses os l'insidieuse vibration du vertige.

"Désolé, Amun. Je ne me répare pas aussi vite que l'armoire."

Une fois assis sur la chaise, Cecil se sentit tout de suite mieux. Cela faisait bien longtemps que le vertige ne l'avait pas pris de manière aussi forte. Il se jura que Peeves le paierait, même s'il devait détruire le château pour cela. Cecil reporta son attention sur Amun.

"Vous savez que le couvre-feu est passé depuis longtemps et que je devrais vous sanctionner pour votre présence ici? Pourquoi m'aidez-vous?"

Cecil lui posa la question avec sincérité. Il voulait savoir pourquoi, car il avait du mal à comprendre la présence d'un élève aussi tard dans les couloirs, et surtout ses motivations pour l'aider ainsi. De son temps, il se serait excusé et serait parti.

Le sentiment de Cecil de se voir en Amun était donc réciproque. Intéressant. Cecil espéra juste que son élève ne venait pas, insidieusement, de le traiter de larve, ce qu'il n'aurait pas beaucoup apprécié. Mais il en doutait. Jusqu'alors, Amun s'était montré loyal et honnête, il n'y avait pas de raison qu'il cesse de l'être. Cecil prit un air sérieux.

"Sache tout d'abord que si nous vous interdisons de vagabonder dans les couloirs, c'est pour une bonne raison. Laquelle, ne me demande pas je n'en sais fichtre rien. A vrai dire ça m'est plutôt égal du moment qu'on ne me dérange pas, et je dois dire que sans toi, je serai encore en train de paniquer en haut de cette armoire. Je vais cependant te punir, car c'est mon devoir. D'ici la fin de l'année, tu devras me rendre un essai de 30 centimètres de parchemin sur le sujet "Faiblesse et Arithmancie". Je ne mettrai pas de note, mais si ton travail me parait satisfaisant, je donnerai des points à ta maison, et cela pourrait même influencer le regard que j'aurai sur ta copie d'examen. Je te punis donc parce que je le dois, et parce que je pense que le travail que je te demande sera bénéfique pour toi. Mais, d'un autre côté je donne vingt points à la maison Serpentard pour ton aide ce soir. Tout cela te parait-il juste?"

Cecil avait toujours la tête qui tournait, mais il se décida enfin à tutoyer définitivement Amun. Ils avaient ce soir passé un cap dans le chemin de l'intimité.

Cecil observa Amun qui ne paraissait pas prendre le devoir de Cecil pour une punition. Il sourit intérieurement en se disant que l'élève lui ressemblait beaucoup et qu'il était véritablement intéressant.

"Oui, je me sens mieux, le vertige est passé. Si tu ne te souviens toujours pas pourquoi tu voulais me voir, je vais te laisser retourner dans ton dortoir. Veux-tu que je t'y accompagne pour que tu n'aies pas de souci?"

En parlant, Cecil s'était mis debout. Il essaya de défroisser sa robe avant de se recoiffer. Il replaça ses lunettes à leur place initiale, sur le haut de sa tête.

Les escaliers. La seule pensée fit revenir le vertige dans l'esprit de Cecil. Il dut poser ses mains sur une table proche pour ne pas tomber. Il se dirigea tant bien que mal vers son bureau et sortit d'un des tiroirs une petite fiole, dont il but une gorgée. Il se rapprocha d'Amun et lui tendit.

"Bois ça. C'est une potion anti-vertige. L'effet dure environ une heure. Je ne peux pas en prendre trop souvent, sinon j'ai d'horribles migraines."

La potion avait un goût atrocement âpre, et Cecil grimaça. Il se dirigea vers la porte, l'ouvrit et se tourna vers Amun.

"Allons-y."

Décidément, Amun était pire que lui. Au moins Cecil avait le sens de l'orientation.

"Remercie alors ton vieux professeur. J'étais élève à Serpentard ici, je connais donc le chemin pour y aller."

Cecil entraina son élève vers les escaliers. La potion faisait véritablement effet puisque le vertige ne se fit pas ressentir en voyant le dédale vertical des marches et des rampes. Cecil ne tenta tout de même pas de se pencher. Il ne fallait pas exagérer.

"Mais si tu ne sais pas t'orienter, comment fais-tu pour aller en cours?"

En effet, Cecil connaissait le chemin très bien, pour l'avoir effectuer un nombre incalculable de fois en son temps au château. Ils arrivaient au rez-de-chaussée. Cecil s'avança vers les escaliers menant aux cachots.

"Je dois vous dire que, dans mon cours, je ne pourrai tolérer vos retards plus que ceux des autres, même si vos raisons sont visiblement plus légitimes que pour bien des élèves. Essayez peut-être de chercher dans certains des vieux livres de sortilèges de la Réserve. Il me semble qu'il y a un chapitre dans l'un d'entre eux sur les sortilèges cartographiques qui pourraient vous aider. Si vous avez besoin, je vous signerai une autorisation."

Cecil et Amun arrivèrent dans le couloir de la Salle Commune des Serpentards.

"Vous savez ce qu'il vous reste à faire pour rentrer, n'est-ce pas?"

Cecil eut du mal à se l'avouer, mais il fut nettement soulagé par la promesse d'Amun. Son honneur resterait, en partie, sauf. Il sourit à Amun et lui tendit la main.

"Merci pour tout, jeune homme. Je vous souhaite une bonne fin de soirée. Au plaisir de vous revoir."

Puis, Cecil tourna les talons et retourna dans son bureau. C'était bien de s'embarrasser devant ses élèves, mais ça ne faisait pas avancer son travail.