Aujourd'hui, examen oral. Evidemment, j'étais l'être le plus stressé sur Terre, à n'en pas douter. Je détestais cordialement ces examens qui vous obligeaient à vous planter comme un imbécile devant des inconnus pour leur débiter des réponses apprises par cœur. D'ailleurs, le simple fait que je savais que j'allais devoir parler me tétanisait. Alors j'avais décidé d'aller travailler pour penser à autre chose. Quoi de mieux que la présence et les soins à apporter aux hippogriffes pour vous mettre en train ?

J'avais donc passé la journée dans le haras, à vaquer à mes occupations habituelles. J'avais un peu chahuté avec l'un des jeunes qui m'avait poussé dans la paille, si bien que j'avais des brins de foin dans les cheveux et une plume du petit qui s'était glissée dans un épi. Je ne m'en étais pas aperçu si bien que c'est avec cette allure pour le moins spéciale que je me rendis à mon examen à l'heure prévue. Le travail et le plaisir d'être là m'avaient donné un peu de baume au cœur et je me sentais prêt à faire ce qu'il fallait pour passer en deuxième année. Après tout, j'étais là pour ça.

Je pénétrai dans l'une des petites salles annexes de l'aile des étalons avec détermination, les poings légèrement serrés dans une attitude de défi. J'y parviendrai, foi de Malefoy !

A peine eus-je examiné la salle que je me rendis compte qu'il n'y avait qu'un seul examinateur. Une bonne surprise, puisque je craignais d'en avoir au moins trois. Sur la table, devant l'homme, se trouvait un pichet de limonade -à en juger par l'apparence- et deux verres. Curieux. Était-ce un piège où souhait-il réellement me mettre à l'aise ? Il me servit un verre tandis que je m'approchais, m'asseyant face à lui. Je gardai les poings serrés sur mes cuisses, stressé comme si ma vie dépendait de ces quelques minutes... Ce qui était le cas, en fait. L'homme me servit un verre de limonade que j'acceptai avec un petit "merci" poli, tandis qu'il commençait :

« Bon, j'ai déjà lu ton compte rendu, jeune homme, mais l'administration veut à tout pris que tu passes un oral. Pas de dérogation possible. Donc commence quand tu te sens prêt. Je te poserai peut-être quelques questions, puis nous passerons à la partie intéressante de l'entretien : ton examen pratique. Sur ce, je te laisse la parole ! »  

Je hochai la tête en expirant, transpirant l'anxiété par tous les pores de ma peau. Qu'avait dit Hana, déjà ? Imaginer l'examinateur nu. Je fis un petit effort de concentration et manquai d'éclater de rire, ce qui eut immédiatement pour effet de me détendre. Bien. J'y parviendrais, parce que je devais le faire. Les hippogriffe étaient toute ma vie... Je commençai d'une voix hésitante mais néanmoins avec tout le courage que j'avais en réserve, les joues légèrement rosies par la gêne :

"Je suis Arnaud Malefoy... et... je suis venu dans ce pays pour étudier la magizoologie... En particulier les hippogriffes. Puisque vous avez lu mon rapport, je vous épargnerai les..."

Je m'interrompis quelques secondes pour poursuivis d'une voix un peu moins tremblante :

"les détails inutiles. J'ai été élevé parmi les hippogriffes et j'ai toujours voulu travailler avec eux, quand je serai adulte. Maintenant que j'y suis, je vais vous expliquer ce que j'ai fait ici cette année. Et je vous demanderai de ne pas prendre en compte ce qui a pu se passer en France avant le début de mes études... S'il vous plaît."

Cela comptait beaucoup pour moi de savoir que j'étais évalué MOI, pas ma famille ni mon passé ou quoi que ce soit d'autres, mais bien mes capacités personnelles. J'attendis l'approbation de l'homme avant d'inspirer un grand coup, de fermer les yeux pour me concentrer et d'expliquer :

"Quand je suis arrivé j'ai été affecté avec l'autre stagiaire aux soins de base des hippogriffes. Il s'agit du travail le plus ingrat mais néanmoins le plus primordial à mes yeux. Le nourrissage, le nettoyage des stalles et les soins apportés au matériel."

Comme je ne le voyais pas, l'examinateur me semblait... A part. Comme si j'étais seul et que j'expliquais à voix haute. Comme si je m'entraînais. Alors je poursuivis de plus en plus naturellement :

"Pour moi, il s'agit de tâches essentielles pour un magizoologiste. Partager ces moments avec l'animal, prendre soin de lui et s'assurer qu'il a tout ce dont il a besoin... Cela crée des liens. Je pense qu'il s'agit là du meilleur moyen de gagner la confiance de l'hippogriffe, de lui donner envie de partager avec nous. Tout comme un humain, il aura d'avantage de confiance envers celui qui le nourrit, qui prend soin de lui et qui lui parle chaque jour qu'en celui qui ne vient le voir que de temps en temps pour lui demander de voler ou de travailler. Ce sont des animaux intelligents et ils comprennent rapidement qui pense réellement à leur bien... Ou pas."

Je n'ajoutai pas ce que je pensais réellement de mon collègue stagiaire, mais cela me brûlait les lèvres. Il n'avait pas envie d'être là et cela se sentait. Les animaux l'avaient compris aussi et l'évitaient... C'était tellement dommage ! Pourtant, l'heure n'était pas aux mesquineries. Je devais seulement penser à mon examen... Alors je continuai sur ma lancée :

"Peu à peu, on m'a donné d'avantage de responsabilités. Cela a commencé par les soins à donner aux plumages et aux robes des hippogriffes. Leur poil est fragile et nécessite un brossage régulier pour rester en bon état. Après quelques semaines, on m'a aussi attribué quelques soins médicaux. Dans les limites de mes compétences bien sûr. J'ai notamment appris à soigner les hippogriffes atteints de conjonctivites, ceux qui souffraient de piquage ou de tendinites par exemple."

Petite pause pour reprendre ma respiration, puis je terminai :

"Dernièrement on m'a demandé de guider les visiteurs dans le haras. Je n'aime pas trop faire cela mais c'est nécessaire alors... J'espère que l'an prochain je serais affecté à l'aile des jeunes, parce que j'apprécie particulièrement le travail avec les plus petits hippogriffes et leurs mères, c'est passionnant. Question théorie, j'ai abordé tous les sujets prévus dans le programme et je suis prêt à répondre à n'importe quelle question... Du moins, si elle était incluse dans le programme. J'ai également quelques connaissances personnelles mais pas grand chose d'un niveau supérieur à une première année, j'en ai peur."

Je finis mon exposé en rouvrant les paupières, regardant mon interlocuteur avec anxiété. La gorge sèche, je bus un peu de limonade en attendant de savoir à quelle sauce il allait me manger...