Histoire de la magie. Quelle détestable matière, tous ces évènements rapportés comme des victoires alors que cela signaient la perte des Sorciers. Les premiers mariages entre sorciers et moldus, l’entrée des sang-mêlés dans les autes sphères politiques ou encore la renommée de certains sang-de-bourbes. C’en était révoltant, et le pire était certainement que toutes ces actions étaient présentées dans la plupart des ouvrages comme des avancées éclatantes pour le monde de la sorcellerie. Cette modernité était le vice de la société. Nocta Severna Yaxley ne comprenait pas très bien cette formule, mais son oncle l’avait prononcée plus d’une fois au sujet de l’histoire des Sorciers, elle était donc nécessairement vraie pour la demoiselle. Cette dernière était par ailleurs occupée à pester contre ces auteurs qu’elle devait lire en histoire et qui étaient rejetés par sa famille. Elle se souvenait d’être revenue pour les premières vacances de l’année passée et d’avoir fièrement récité les premiers mots de ses leçons, les dates basiques qui étaient appris aux premières années. Et sa joue se souvenait encore de la gifle monumentale qu’elle s’était reçue. Il n’y avait eu ni cri, ni pleur, seulement de l’incompréhension et un long silence : Arcturus Yaxley détestait encore plus quand Nocta se mettait à pleurer ou à répondre. L’incident s’était clos par une menace et par des cours d’histoire sans cesse repris par son oncle, à chaque vacance. Ce dernier faisait ce qu’il pouvait pour faire retenir à sa nièce les dates traditionnelles et oublier celles qui n’avaient, à ses yeux que peu d’intérêt. Nocta s’assurait donc de retenir ce qu’il fallait pour se maintenir à une moyenne à peu près correcte et de tout oublier lorsqu’elle rentrait pour les vacances. C’était, mine de rien, un exercice compliqué. Tandis qu’elle peinait à se concentrer sur le manuscrit et à en apprendre les dates, le bras d’un élève ricocha sur sa tête. Celui-ci semblait prendre ou reposer un livre. Nocta se leva vivement, elle avait besoin d’une distraction, parfait ! L’impertinent osa la regarder dans les yeux et dire :

« Je suis désolé sincèrement pardon. Si vous voulez me frapper je comprends encore désolé. »

Une victime. C’était le genre de personnage qui agaçait particulièrement Nocta, le genre d’élève qui se victimisait avant même d’être attaqué. Cela ne faisait que renforcer l’instinct de supériorité de la demoiselle et son envie de l’humilier au plus haut point. C’en était presque de la rage, il lui fallait pourtant se contenir. Elle s’avança vers le petit Serdaigle et répondit froidement :

« Te frapper ? Parce que tu penses que je laisserai ma peau entrer en contact avec toi ? »

Un rire mauvais secoua ses frêles épaules avant qu’elle ne lui arrache le livre des mains. Elle jeta un coup d’œil à ce dernier avant de l’envoyer se ranger par magie. Elle le sonda de ses grands yeux bleus glacés pendant de longues secondes : il était petit, chétif, brun aux yeux clairs. Il ressemblait à Llewellyn, aussi faible que lui, mais en Serdaigle. Et en encore plus petit, si c’était possible. La petite peste releva la tête et reprit de sa voix glacée :

« Alors dis-moi, le petit aigle est un sang-de-bourbe ou un sang-mêlé ? Car de toute évidence, si ton sang est pur tu n’es qu’un traître pour dégager une aura aussi pathétique ! »

Elle le toisa en attendant sa réponse. Elle pourrait s’amuser un peu avec lui … jusqu’à ce qu’un professeur ne vienne mettre son grain de sel.

Le pauvre Serdaigle était mort de trouille, à tel point que c’en était presque pitoyable. Il ne semblait pas vouloir se révolter, ce qui n’avait rien d’intéressant pour la jeune Serpentard. Mais bientôt son attitude se métamorphosa, elle passa de la peur à de la colère. Le sourire de l’héritière Yaxley s’étira un peu plus… Voilà qui commençait à devenir un peu plus amusant. Il fallait qu’elle profite de cette irritation pour pousser à bout le première année. Mais ce dernier ne semblait pas encore assez courroucé pour s’aventurer dans un vrai combat, dans le genre de duel inégal que Nocta aimait mener. Il était tellement chétif… Nocta était certaine de n’avoir jamais ressemblé à quelqu’un d’aussi faible, même lorsqu’elle n’était pas encore au collège. La demoiselle écouta l’annonce de son interlocuteur avec le même sourire moqueur :

« Aucune idée, je ne connais pas mes parents mais je sais qu’ils étaient tous les deux des sorciers mais leurs parents, je peux pas te répondre. »

Pathétique. Littéralement. Quelle était donc cette répartie décevante ? Cette honnêteté faisait honte à la maison des aigles selon la jeune fille. Leur intelligence aurait pu leur permettre d’atteindre des sommets, au lieu de quoi ils étaient beaucoup trop attachés à cette honnêteté qui n’avait, pour Nocta, aucune valeur, ni même aucune signification. Et puis, comment pouvait-on vivre sans connaître par cœur son passé, sans avoir appris le nom de chacun de ses ancêtres et découvert leur vie ? C’était inconcevable pour elle… Le petit brun récupéra son livre, ce qui eut pour effet d’agacer la demoiselle. Mais elle ne lui reprit pas, elle se contenta de glisser sa main dans la poche intérieure de sa cape, où se trouvait sa baguette en bois d’if. A défaut de la brandir -du moins pour l’instant-, elle rétorqua froidement au gamin -qui n’avait en soi qu’un an de moins qu’elle :

« C’est lamentable. Pas étonnant que tu paraisses être aussi faible. On ne peut savoir qui l’on est si l’on ne sait pas d’où l’on vient… »

Elle attendait sa réponse, espérant une insulte ou n’importe quoi pour sortir sa baguette de son étui…

Il tourna les talons. Nocta n'en revenait pas, comment osait-il s'en aller sans lui répondre. Les joues de la demoiselle rougirent sous l'affront et elle serra sa baguette dans sa main droite. Il partait, il fallait donc qu'elle prenne rapidement une décision. Dans sa tête se mêlèrent ses "résolutions", la promesse qu'elle avait faite à sa famille de ne plus se faire remarquer, l'apathie qu'elle avait pour son nouveau directeur de maison... Mais encore une fois l'adrénaline qu'elle ressentait à chaque fois qu'elle brisait les règles ou qu'elle usait d'arrogance prit le dessus et elle brandit sa baguette blanche sans même s'en rendre compte. C'était trop tard. Elle jeta un coup d'oeil à sa droite et à sa gauche: personne. Elle dit donc sur un ton ferme mais doux, pour ne pas attirer l'attention d'un professeur:

"Accio!"

Le sort toucha avec brio le livre du Serdaigle qui croyait bien s'en tirer et retomba dans les mains de la jeune Serpentard. Les lèvres pincées, cette dernière glissa son arme dans sa poche et agita le livre sous le nez du première année. Elle avait fait en sorte que sa baguette en bois d'if ne soit plus visible car il était certain que la situation deviendrait clair pour une personne passant près d'eux. Nocta avait déjà une sale réputation, si un mouchard ou même un Adem passait par là et apercevait la petite peste sa baguette tendue en direction d'un pauvre petit Serdaigle de première année, elle en prendrait pour son grade c'était certain. Et elle serait encore convoquée et punie et ainsi de suite. Or c'était exactement ce qu'elle voulait éviter en ce début d'année.

"C'est malpoli de ne pas répondre, tes parents ne te l'on jamais dit?"

Elle fit en sorte que l'ouvrage soit hors de portée du garçon aux yeux bleus et continua à la fixer avec un petit sourire moqueur. Voyons s'il voulait repartir sans son livre maintenant...

Nocta se sentait quelques peu agacée par cet élève qui ne répondait à aucune de ses provocations. Mais il n'était pas le premier, elle savait que parfois c'était eux les plus virulents, ceux qui sont d'un calme apparent et qui s'avèrent en fait être les pires lorsque leur colère refait surface. Nocta était bien placée pour le savoir. La demoiselle sourit avec arrogance après la réplique du Serdaigle:

"Tu vois je ne vais pas te laisser ce plaisir, moi je ne suis pas comme toi de plus le livre que tu as dans ta main je l'ai déjà lu. Comme je suis gentil contrairement à toi je te laisse le livre."

Un vrai petit aigle avide de savoir, il n'y avait qu'eux pour relire les livres de la bibliothèque plusieurs fois. Non pas que Nocta ne soit pas capable de relire plusieurs fois le même ouvrage mais elle faisait en sorte d'acheter elle-même l'objet lorsqu'il lui plaisait, afin d'enrichir la grande collection du manoir et ne pas emprunter maintes fois le livre en bibliothèque. L'insupportable garnement fit mine de se retirer, tournant les talons. Les joues blanches de la jeune Yaxley s'empourprèrent et ses doigts se serrèrent autour de sa baguette claire. Elle prit une inspiration et dirigea son arme précieuse en direction des jambes de sa nouvelle proie. Elle jeta alors le maléfice du Croche-Pied sur le petit brun et rangea soigneusement le livre sur son étagère -elle n'avait pas vraiment envie de se mettre à dos la bibliothécaire- avant de se planter avec satisfaction devant le première année.

"Gentil. C'est ce que tu utilises comme terme pour ne pas dire faible?"

Un rictus s'installa sur son visage de poupée tenant d'une main sa baguette en bois d'if et de l'autre triturant l'une de ses longues mèches blondes.

Le rouge monta rapidement aux joues de Nocta alors que la trace de la gifle était encore imprégnée sur sa joue blanche. La demoiselle releva des yeux bleus glacés sur celui qui avait osé la toucher. Si son masque de poupée ne rflétait qu'une impassibilité à toute épreuve, ce n'était pas le cas intérieurement. La jeune fille fulminait et se se sentait capable de jeter n'importe quel sortilège qui lui passait par la tête pour se venger. Elle s'obligea à se calmer mais la vision de ce qui venait de se produire passait en boucle dans sa tête. Il avait osé lever la main sur elle, lui, un petit idiot de Serdaigle.

"Ne recommence plus je déteste me battre et utiliser la violence!"

Et il osait lui dire ça en face. Lui donner un ordre? Il donnait un ordre à Nocta Severna Yaxley en énonçant son pacifisme. Un sentiment d'outrage profond que ne pouvait ressentir que ceux dont la fierté était exacerbée la saisit alors.  La jeune fille battit plusieurs fois des cils comme si elle se réveillait d'un rêve et fit glisser ses doigts fins sur sa joue encore rouge. Elle sentait la brûlure des doigts du Serdaigle sur sa peau. Nocta répugnait à tout contact physique, même avec des gens qu'elle estimait. Mais avec un première année stupide, c'était inimaginable, impensable même. Elle allait lui faire payer. Elle allait lui faire regretter de s'en être pris à la descendante d'Arcturus Yaxley. La jeune fille esquissa un sourire crispé, fruit de sa frustration et de sa maîtrise de soi avant de crier:

"Serpentsortia!"

Elle avait répété ce sort des centaines de fois près du Lac Noir, pour essayer de parler au serpent, pour entraîner son Fourchelang, comme son oncle lui avait conseillé. Elle avait même été surprise par Rowena, cette idiote de Gryffondor! Mais au moins elle maîtrisait désormais ce sortilège à la perfection et un sublime cobra siffla devant elle, prêt à bondir sur Jeff. Nocta était quant à elle prête à jeter un autre sort tellement sa colère était grande, se moquant bien des nouvelles retenues qu'elle pourrait essuyer, des convocations et des punitions qu'elle avait déjà. Se moquant d'être dans la bibliothèque. Elle ne pouvait tolérer un tel manque de respect à son égard. Personne ne levait la main sur elle à Poudlard, et certainement pas un pauvre Serdaigle de première année. Mais quelqu'un arrivait sur ces entrefaites...

Un fantôme. C'était un fantôme qui venait de s'interposer entre Nocta et l'imbécile de Serdaigle. Ou plutôt entre le serpent que Nocta avait fait apparaître et le première année... Mais ce n'était surtout pas n'importe quel fantôme. La jeune Serpentard avait évidemment entendu parler du seul professeur fantômatique de Poudlard, Lavender Greengrass, ancienne sorcière de sang-pur qui plus est, donc déjà bien connue dans ce milieu. Elle déglutit donc en la voyant arriver ainsi, mais n'en laissa rien paraître.

"Mademoiselle, j'exige que vous fassiez immédiatement disparaître ce serpent d'ici."

Et avant-même que la demoiselle ne puisse s'exécuter le professeur reprit, faisant en sorte que le cobra n'avance plus vers le Serdaigle:

"Vingt points en moins pour Serpentard. Si vous tardez, ce sera d'avantage. Ensuite, vous m'expliquerez tous le deux ce qui s'est passé ici et je verrais ce que je ferais de vous."

La jeune deuxième année serra sa baguette dans sa main en entendant le nombre de points qu'elle venait de faire perdre à sa maison. La seule chose qui pouvait un tant soit peu la consoler était qu'elle en faisait gagner presque autant en fonction des cours qu'ils avaient chaque jour grâce à son assiduité et son niveau de magie. Mais vingt points lui paraissait quand même une perte énorme. Elle jeta un regard venimeux au Serdaigle: tout ça était de sa faute. Puis, évitant que le décompte de points n'augmente si elle ne faisait rien, elle pointa sa baguette sur son serpent si brillamment invoqué pour dire:

"Evanesco!"

Aussitôt le reptile se tortilla sur lui-même, comme dévoré par un feu inconnu et fut bientôt réduit en cendres. Par chance le garçon en face d'elle n'avait encore rien dit dans son extrême stupidité et Nocta prit les commandes. La demoiselle endossa son rôle de talentueuse actrice et de parfaite menteuse pour prendre un visage désolé. Elle fronça les sourcils d'un air contrit en rangeant sa baguette blanche en bois d'if avant de se tourner vers le professeur Greengrass. Elle accentua sa voix pour que celle-ci ait l'air plus cristalline qu'à son habitude et fit glisser une nouvelle fois ses doigts sur sa joue encore rouge:

"Excusez-moi professeur. Elève Yaxley de Serpentard, en deuxième année, précisa poliment la petite peste, je... je voulais atteindre un ouvrage un peu trop haut à côté de la table de mon camarade quand j'ai glissé et lui suis tombée dessus. Il est alors entré dans une colère noire et m'a giflé, comme vous pouvez le constater."

La Serpentard laissa entrevoir la marque avec une petite grimace, puis reprit de sa voix faussement remplie d'émotions:

"J'avoue m'être alors emportée trop vite et ne pas avoir réagi en proportion mais je ne m'attendais vraiment pas à ce qu'il me frappe ainsi, je n'ai pas réfléchi avant d'utiliser le sortilège, veuillez m'excuser."

Elle n'avait pas menti au moins pour sa dernière affirmation: elle ne s'était vraiment pas attendue à ce qu'il la blesse de cette façon et son orgueil s'en était vu largement bafoué. Mais elle comptait bien avoir sa vengeance, avec ou sans l'aide du professeur Greengrass. Elle avait déjà eu plusieurs adultes dans ses filets grâce à ses mensonges, une fois de plus ne serait pas une surprise. Elle attendait donc avec un moue blessée et désolée la réaction du fantôme, se souciant peu de la réaction du Serdaigle: quoiqu'il puisse dire elle se savait meilleure menteuse que lui, restait à savoir si le professeur s'en rendrait compte ou non...

"Je m'appelle Jeff Vandomne, je suis en première année. Je suis arrivée dans la bibliothèque tout à l'heure et j'ai malheureusement bousculé la jeune fille, je me suis excusé et elle ma demandé si j'étais un sang mélée ou un fils avec des parents moldus, je lui ai expliqué que j'ai été abandonné par mes parents, puis elle a commencé à me faire une remarque sur le fait que je ne connaissais pas mes parents, je suis partis pour éviter de m'énerver puis elle me vola mon livre et elle me fit trébucher en disant que mes parents ont mal fait mon éducation, j'avoue je l'ai giflé, puis vous connaissez la suite."

L'indignation se peignit doucement sur le visage de la jeune fille tandis qu'elle plaquait une main sur sa bouche comme pour retenir un cri. Il ne fallait pas en faire trop non plus, mais il lui semblait nécessaire de paraître outrée après avoir entendu de "telles mensonges" proférés par son "agresseur". La Serpentard fit aisément passer son indignation à une colère noire et ça n'avait rien de compliqué: d'aussi loin qu'elle se souvienne, la jeune Yaxley avait toujours été en colère contre quelqu'un ou quelque chose, c'était naturel chez elle.

Elle fronça donc les sourcils et se tourna vers Jeff en faisant comme si elle oubliait la présence de Greengrass. Ce n'était évidemment pas le cas, elle avait très bien conscience de son public et de l'importance du numéro qu'elle était en train de jouer. La petite peste blonde serra un poing tandis qu'elle agitait un index menaçant devant le Serdaigle:

"T'es qu'un menteur! Comment tu peux oser inventer tout ça?"

Elle stoppa son geste à une distance raisonnable du jeune garçon puis haussa les épaules comme si après tout, tout ça n'avait plus d'importance.

"T'as de l'imagination en tout cas, c'est le moins qu'on puisse dire!" enchaîna-t-elle avec une fausse amertume.

Elle voulut encore ajouter qu'elle n'avait pas que ça à faire d'embêter un première année et qu'elle avait juste cherché un peu de calme pour réviser, mais empêcha à temps les paroles de s'échapper de sa bouche: ça aurait fait trop, il ne valait mieux pas s'étendre et garder des réactions qui se voulaient spontanées et non réfléchies. Elle braqua donc son regard sur Jeff et attendit une quelconque relation du fantôme qui enseignait les runes à Poudlard, en espérant qu'elle tomberait comme beaucoup d'autres avant elle, dans le panneau.