« Soit A un succès dans la vie. Alors A = x + y + z, où x = travailler, y = s'amuser, z = se taire. »

C'était ainsi que se terminait la lettre des parents de la petite Serdaigle. Une phrase d'Albert Einstein, qui intriguait fortement la jeune fille. Elle lisait et relisait cette étrange formule, l'air perplexe. Alistine ayant beaucoup de respect et même d'admiration pour le savant allemand, elle s'était persuadé qu'il y avait là de sa part quelque message secret, une logique à trouver, afin de véritablement décortiquer cette phrase d'apparence si simple. Afin de vraiment profiter de son conseil.

Elle avait déjà été intriguée par le fait qu'il décrive A comme la résultante de trois données nommées x y et z. Comme pour placer A dans l'espace. Via l'arithmancie, par les nombres agissants, elle avait alors donné une valeur numérique à chaque mot. Work, Play, Keeping your mouth shut. Ainsi, elle obtint x1=18, y1=15 et z1=97. En réduisant d'avantage, elle obtenait alors x=9, y=6 et z2=16. D'où z=7. Neuf, six et sept.

Elle se mordit la langue. Elle avait beau chercher, elle n'arrivait pas à voir de schéma regroupant ces trois nombres. Elle ne trouvait strictement rien du tout. Elle finit par déchirer les parchemins sur lesquels elle travaillait, par dépit. Puis souffla.

Après tout, c'était peut être normal qu'une approche sorcière ne fonctionnait pas. Albert Einstein n'était pas un sorcier, mais un physicien. Il connaissait mieux la musique, en tant que joueur de violon, que les mystères des chiffres. D'autant qu'il détestait les mathématiques. Elle se demanda vaguement si le Professeur Lovegood pourrait l'aider, avant de décider que c'était à elle seule de comprendre la clef de cette équation. Sinon, elle n'aurait aucun mérite. Elle devait se montrer digne d'Albert Einstein. Malgré qu'elle ne soit pas aussi intelligente que lui, à force de travail et de patience, elle arriverait peut être à approcher son génie, au moins un peu.

Avant tout, elle devait se rafraichir les idées, penser à autre chose. Elle pourrait très bien continuer à travailler sur sa potion. Elle en était maintenant à une dizaine d'essais, les derniers approximant enfin les résultats escomptés. C'est à dire qu'ils n'empoissonaient plus le cobaye, aka elle-même. Elle s'était même sentie un peu plus légère sur le dernier. Puis elle avait commencé à gonfler, dégonfler, gonfler…

Le problème, c'était qu'au final, elle tatonnait au hasard plus qu'autre chose. Il y avait tellement de paramètres à prendre en compte.

Elle allait justement reprendre l'intrégalité de ses notes, pour se rappeler de chaque test, avec ses résultats, et analyser tout ceci. Elle utilisait du foie de rat séché, des yeux de poissons ballons, des dards de Billywig et des brins de sisymbre. Soit un ensemble de quatre ingrédients. Les potions à quatre ingrédients ou moins sont en générales très simples. Il s'agit le plus souvent de faire une base au mortier, la verser dans le chaudron, faire bouillir, puis cuire, et ajouter un dernier ingrédient en touche finale. Le plus compliqué était donc d'une part, savoir quand, combien de fois, dans quel sens il faudrait mélanger. Et bien sûr, d'autre part, les dosages précis.

Elle avait créer quatre bases différentes. Ainsi, elle classa ses différents essais selon celles-ci. Pour deux d'entre elles, elle utilisait trois ingrédients, et seul le sisymbre était à ajouter après. Pour les deux autres, la base ne comportait pas de dard de Billywig. Pour ces deux façons de faire, ce qui différenciait les deux bases était la façon de mesurer le foie et les yeux. D'une part, elle réduisait en poudre les deux ingrédients séparément, pour ajouter exactement le même nombre de mesures, et d'autres part, elle les réduisait ensemble, afin de mieux mêler leur principe actif. Elle se mordit doucement la langue.

Avec la première méthode de mesure, elle avait systématiquement des problèmes au niveau du corps. Il enflait toujours. Parfois, il jouait au yoyo. Elle en déduisit que la concentration de ce qu'elle nommait principe actif était différente, et que donc, il ne fallait effectivement pas prendre la même masse. Elle se tapota le crâne doucement. Cela aurait du être évident, elle avait fait assez de chimie pour connaître et envisager cette possibilité bien avant.

Mais quand elle mélangeait les deux ingrédients ensemble… Elle obtenait bien trop souvent ni plus ni moins qu'un véritable poison. Heureusement, elle testait ses essais sur des insectes avant. Les insectes, c'est moche, dégoutant et terrifiant, alors, elle ne trouvait ça pas grave du tout. Elle reprit ses livres de potions, pour rapidement vérifier quelque chose. En effet, jamais le foie de rat séché et les yeux de poissons-ballons étaient utilisés en même temps. Elle devrait certainement étudier ce mélange un peu plus longuement. Elle classa ces essais selon la virulance du poison obtenu. Elle comprit ainsi que plus les yeux étaient en quantité par rapport au foie, moins la potion présentait de danger. Elle classa ainsi de même tous ces autres essais, pour sélectionner ceux qui étaient dans ce cas.

Ce faisant, elle garda en main, sur la cinquantaine d'essais effectués, une dizaine seulement. On était dans l'ordre du 1 pour 5 au 2 pour 6. En terme de transformations du corps, c'était aussi les moins catastrophiques. Ayant ainsi réduit son champ des possibles pour le dosage de ces deux ingrédients, elle pouvait passer à la suite.

Elle entendit quelques tintemints. Quelqu'un venait de rentrer dans le dortoir. Alistine y avait installé un carillon à vent, que ses parents lui avaient offert en même temps que des gants immitation fourure d'hermine à son anniversaire. Ses camarades, pour une fois, avaient globalement apprécié cette initiative. Il prévenait de l'arrivée d'une autre dans la pièce, tout en restant agréable. Elles aimaient moins la nuit, quand Alistine faisait des allers retours entre le dortoir et la salle commune pour on ne sait quoi.

« Alistine ? Y a deux Poufsouffles qui t'attendent devant la salle commune. »

L'adolescente s'exclama, elle avait complètement oublier tout ceci. Aussitôt, comme une fusée, laissant là toutes ces notes, elle fila les rejoindre. Aujourd'hui, Gidéon lui avait promit de l'aider à receuillir quelques ingrédients de potions. On pouvait se fournir, si l'on était attentif, dans le parc de Poudlard. Aujourd'hui, ils allaient notemment receuillir quelques bouteilles de mucus de Veracrasse. Gidéon en avait repéré toute une colonie à la lisière de la forêt, et sitôt qu'il en eut parlé, Alistine voulu en prendre.

Non pas qu'elle en manquait dans sa formidable réserve d'ingrédients -formidable pour une étudiante. Mais elle n'allait tout de même pas manquer cette formidable opportunité non ? Elle se demanda un instant si sa potion ne serait pas mieux réussis avec du mucus, avant de secouer la tête. Si elle rajoutait un cinquième ingrédient, tout allait se compliquer. Et ça l'était déjà bien assez.

En chemin, elle ceuillit encore quelques plantes magiques du parc -elle en vola même une dans une serre entrouverte, avant que Gidéon ne la retrouve et la fasse sortir en la tirant par les oreilles- avant de faire fasse à la dite colonie. Elle émit une franche grimace de dégouts. Ces bestioles étaient affreuses. Puis elle mit ses gants en peau de dragon -elle refusait de les toucher à mains nues- et commença, patiemment -autant que possible pour elle- de receuillir l'immonde mucus.

A ses côtés, Gidéon s'affairait tout autant, bien plus calme et attentionné envers ces sales bêtes. Angelina, elle… Et bien, disons qu'il s'agissait d'Angelina, et qu'elle seule pouvait donc comprendre ce que sa chaussure droite avait de si passionnant.

Après cette belle récolte, les trois amis décidèrent de s'installer dans le Parc. Avec le retour des beaux jours, celui ci se repeuplait à nouveau les week-end de tous les élèves qui haïssaient la bibliothèque. Alistine elle n'y venait jamais que quand Gidéon et Angelina lui forçaient légèrement la main. Elle avait beau protesté qu'elle ne risquait pas d'avancer des ses recherches, ou d'apprendre ses cours, en paressant au soleil, rien n'y fit.

Ils s'allongèrent dans l'herbe, et observèrent tranquillement les nuages dans le silence. Ils étaient bien étrange, à aussi peu parler entre eux, ces trois là. Alistine en profitait pour songer à nouveau aux mots d'Einstein.

« Soit A un succès dans la vie. Alors A = x + y + z, où x = travailler, y = s'amuser, z = se taire. 
- Qu'est ce donc que ça ? Une nouvelle formule pour une potion ?
Non, c'est les mots d'un savant moldu très célèbre.
- C'est juste de la philosophie. Tu ne devrais pas trop t'en occuper. Tu travailles et tu t'amuses. Tu ne parles pas à tord et à travers. Alors, tu ne tarderas pas à le trouver, ton succès. D'ailleurs, ta potion, t'en es où ?
- Je peux vous montrer si vous voulez. »

Aussitôt dit, aussitôt fait, les trois quatrièmes années se rendirent d'abord à la tour des Serdaigle, pour récupérer les affaires d'Alistine, puis aux cachots, lieux de ses expériences.

« Alors, j'ai réussi à avancer dans le dosage de deux ingrédients. Mais pour le reste, c'est le flou le plus total. Alors, il faut que je fasse quelques calculs... »

D'un coup de baguette magique, elle fit ressortir toutes ses notes. Elle prit un nouveau parchemin, et commença à écrire dessus plusieurs calculs. Elle rayait, recommençait, les yeux brillant. Elle était dans son élément. Ce genre de tâche l'amusait au plus haut point. Et quand elle se concentrait, elle était d'autant plus efficace.

Finalement, elle prit ses ingrédients, son chaudron, et commença. Dans deux mortiers, elle réduisit en poudre d'un côté un foie de rat séché, de l'autre, plusieurs yeux ballons. Elle prit deux mesures de l'un et sept de l'autre, qu'elle versa dans le chaudron. Elle porta alors son mélange à ébullition pour quinze secondes, ni plus ni moins. A la fin de celles ci, elle ajouta six dards de Billywig, puis enclancha un minuteur. C'était partit pour quinze minutes de cuisson à frémissement. Peu à peu, la potion prenait une teinte rouge.

A la fin de cette cuisson, elle mélangea quatre fois dans le sens des aiguilles d'une montre, puis trois fois dans le sens inverse. La potion passa alors au violet, pour arriver à un bleu violacé. Enfin, elle ajouta, un à un, huit brins de sisymbre.

A la fin, elle obtint une potion d'un bleu pervenche, aux volutes fins qui filaient droit vers le plafond. La Serdaigle souffla doucement. De son sac, elle sortit une boite contenant quelques mouches. Une goutte de potion fut déposée dans la boite de petri. Les mouches ne tardèrent pas à en boire. Il n'y eut d'abord aucun effet en particulier. Ce n'était donc pas un poison. Pas un très virulent, en tout cas. Le temps passait, sans que le comportement des mouches semblent perturbés. Alors, la jeune fille se décidé à tester la potion sur elle-même.
Elle prit une fiole, la remplit du liquide bleu, puis la bu cul-sec. Rapidement, elle sentit son corps s'alléger, s'alléger. Un pas, un seul, la fit bondir au plafond. Puis elle retomba doucement, comme une feuille.

Un éclat de rire la prit, alors qu'elle s'amusait désormais à sautiller dans tout le cachot. Ses deux amis ne tardèrent pas à la rejoindre. Ils ne volaient pas, mais la densité de leur corps étaient devenue suffisament petite pour qu'ils puissent se sentir comme sur la lune. Jusqu'à ce que les effets de la potion commencent à se dissiper, moment où Gidéon décréta qu'ils devraient éviter de sauter au plafond, pour ne pas retomber trop fort.

En rangeant ses affaires, Alistine eut une dernière pensée pour Einstein. Aujourd'hui, sa plus grande réussite n'était pas cette potion, mais tout simplement d'avoir comprit que le monde n'était pas que mathématiques.

Soit A un succès dans la vie. Alors A = x + y + z, où x = travailler, y = s'amuser, z = se taire ~ Albert Einstein