Link flânait dans le château, attendant patiemment le cours qui devait commencer dans une demi-heure. L'avantage d'être en septième année était qu'il avait beaucoup de temps pour lui, beaucoup de temps à perdre et donc beaucoup de temps pour se balader dans le château. Bien que l'hiver soit là depuis un petit moment, et que la neige ne semblait pas vouloir cesser de tomber encore et encore, recouvrant de son blanc manteau toute la campagne à l'entour, le muet se plaisait à sortir, alors que ses camarades se protégeaient du mauvais temps à l'intérieur. Le Poufsouffle enfilait alors son grand manteau rituel, l'odeur de paprika remontant dans ses narines, et se baladait dans le silence si accueillant de l'édifice en pierre. Il lui arrivait parfois d'être oppressé par son propre silence. Par celui des autres, rarement. Link avait appris à respecter les silences, du plus petit entre deux respirations au plus grand qui dure toute une vie.  Le sien par contre, le mettait en colère. Il le narguait continuellement et s'amusait à lui montrer que sa présence était forcée, non voulue, surtout quand le muet aurait voulu s'exprimer pour les choses les plus simples, comme dire à ses proches qu'il les aimait. Dire et pas écrire.

Link frissonna légèrement lorsqu'une petite brise s'engouffra par les fenêtres du couloir extérieur, et rejoignit tranquillement le cinquième étage. Sur un coup de chance, il ne croisa personne, et s'il le fit, il était bien trop occupé à regarder ses pieds pour le remarquer. Il salua quelques tableaux sur son passage, tout de même, qui lui rendirent son salut avec plus ou moins d'enthousiasme. Enfin, il atteignit sa salle de classe et se mit légèrement en retrait de ses dix autres camarades, attendant que l'heure « sonne » et que le cours débute.

Le muet avait été surpris de voir autant de monde ayant choisie l'option d'études des runes. Pour sa part, il avait surtout été curieux. Plusieurs portes se fermaient à lui, sa magie étant difficilement contrôlable en informulée et au vu des notes qu'il avait eu aux BUSES. Ainsi son T en métamorphose lui avait clairement fait choisir autre chose, tout comme son O en potion et botanique lui avaient ouvert la voie. Pour ce qui était de l'Etude des Runes, le jeune homme avait choisie cette option, en troisième année car elle était peu commune et elle l'intriguait. Parce que les Runes étaient un type de langage. Et comme le langage l'avait toujours intéressé (il était bilingue, bien qu'il ne parlait pas véritablement anglais, il savait l'écrire et le comprendre dans toutes ses subtilités, tout comme sa langue natale, le français), en apprendre un nouveau le ravissait. Il ne s'était pas ravisé en voyant la difficulté des textes et la complexité des dessins, bien au contraire. Et les premières années, avec son professeurs particulier, Link avait parcouru l'histoire des runes celtiques, de leur conception jusqu'à leur transformation en passant par l'apogée de leur utilisation. Et il avait adoré ça. Peut-être cela expliquait-il son Effort exceptionnel aux BUSES. Bien sûr, Link n'avait pas eu que des bonnes notes. La plupart des matières qu'il avait abandonnées représentaient un Piètre ou un Troll sur son bulletin de note de cinquième année. Mais pour le reste, allant d'Acceptable à Optimal, il avait fait de son mieux et avait décidé de continuer de suivre ces matières. Il se trouvait que l'Etude des Runes était l'une d'elle.

Le muet avait été ravi d'intégrer la classe de Mme Greengrass. C'était une femme étrange. Ou peut-être était-ce seulement parce qu'elle était morte. Il l'avait déjà croisée plusieurs fois dans le château, ayant l'air légèrement plus jeune et babillant seule ; mais ses camarades de Poufsouffle en avaient parlé comme de la « vieille folle ». Aussi il avait conclu que ce n'était pas elle (ses camarades n'auraient jamais parlé d'une professeur ainsi). Il avait essayé de croquer ce fantôme à la lueur de folie dans les yeux. Mais quand il l'avait croisée, il n'avait vu dans son regard que tourments et détresse. Il l'avait croqué quand même, avec un pastel gris. Juste un bandeau avec deux yeux. Deux yeux qui parlaient d'un passé triste et lugubre.

Il ne connaissait pas les liens qui liaient les deux jeunes femmes, toujours était-il que le muet appréciait énormément son professeur. Elle était stricte, oui, un peu comme l'avait été, parait-il, Minerva MacGonagal, Professeur de Métamorphose et directrice des lions du temps d'Harry Potter. Elle avait l'air de toujours vouloir être tirée à quatre épingles, alors que son statut de fantôme le lui empêchait. Mais cet attitude respectueux et franc qu'elle semblait avoir envers ses élèves plaisait au faux blondinet.

Le premier élève ouvrit la porte et tout le monde s'engouffra dans la salle. Quand le muet entra, il fit un léger signe de tête à Mme Greengrass, en guise de bonjour. Il s'assit à sa place et sortit rapidement ses affaires. Leur professeur ne perdait jamais son temps à tergiverser au début de son cours et rentrait directement dans le vif du sujet.

- Bonjour jeunes gens. Sortez, je vous pris, vos travaux de la semaine. Nous avions donc une version de hiéroglyphes, et  une version en sumérien. J’espère que cette dernière vous a intéressé. Nous y reviendrons plus tard dans notre cours d’aujourd’hui même, puisque nous aborderons les rapports, parfois tendus, entre les sorciers de Sumer et d’Akkad. En tout cas, comme vous avez du le comprendre grâce à ce traité, Sumer considérait les Akkadiens comme des mages aux talents médiocres. Bien que la faute en revenait surtout à des pratiques différentes de la magie. Nous sommes encore bien loin de la baguette magique et de son hégémonie. Monsieur Wasilei, ramassez ces traités, je vous pris. Monsieur Brown, ramasser les versions de hiéroglyphes.

Link se leva alors qu'il regardait son camarade musicien sortir sa baguette. Il n'en fit pas cas et ramassa les copies à la moldue, avec ses deux mains. Ses camarades le regardaient étrangement mais il n'allait pas se fatiguer pour si peu. S'il pouvait se passer de magie, il le faisait. Point. Pendant que sa professeur parlait, il ramassait les copies, se rappelant de la version qu'ils avaient eu à faire. C'était tellement intéressant de voir les divinités moldues sous un autre angle. Et cela apportait son lot de question. Est-ce que les divinités grecques étaient également des sorciers ? Et si oui, avaient-ils tous existé ? Comment s'était construit leur mythe ? Et comment, s'ils étaient sorciers, se faisait-il que seuls des éléments ou des choses précises leur soient dédiés ? Quoi que, cette question pouvait aussi bien se poser pour Isis et Osiris et, étrangement, que la magie soit noire ou blanche paraissait une raison trop faible pour le muet.

Link se rassit au moment même ou l'un de ses camarades se levait pour faire face au projecteur. Il était ravi de ne pas le faire. Ainsi, il pouvait noter les commentaires de son professeur plus aisément.

- Pour ce cours, nous laisserons quelques temps de côté le cunéiforme sumérien,  pour voir l’akkadien. Comme vous pouvez le constater sur cette première image, les deux sont particulièrement semblables. C’est normal. Le sumérien est apparu en premier, d’abord sous forme logographique. Qui me rappelle la définition d’un logogramme, et m’en donne un exemple essentiel ?

Un élève leva la main alors que le muet se rappela la définition dans sa tête.

C'est un sigle, un dessin qui désigne un mot. Un des exemples les plus connus sont les kanjis, de nos jours.

Bien sûr, son camarade répondit avec brio et apporta dix points à la maison Serdaigle. Le cours put alors continuer.

- Le sumérien évolua petit à petit vers l’écriture cunéiforme que nous étudions. Sous l’influence de l’akkadien. L’akkadien étant lui-même né d’un dérivé du sumérien. Les deux langues s’empruntèrent mutuellement. Mais le sumérien est bien plus rare. Pour cause, il eut un conflit entre ces deux Cités Etats, et Akkad la remporta. Puis domina la région dite de Sumer. Imposant sa langue. Le sumérien ne fut plus qu’user à des fins liturgiques. Ou magiques. Je parlais plus tôt du mépris des mages de Sumer pour ceux d’Akkad. Nous pouvons le comprendre via ce traité, mais aussi via quelques récits akkadiens décrivant les duels de l’époque. Les Sumériens étaient des enchanteurs. Leur magie protégeait des objets, des personnes. Les Akkadiens eux savaient lancés des maléfices. Ils étaient plus libres dans un duel, par conséquent. C’est comme si vous essayez de gagner un duel uniquement grâce à votre chapeau enchanté pour lancer un Protego quand vous êtes la cible d’un sort. Vous ne pouvez pas gagner. Ainsi, nous avons de nombreux vestiges enchantés de Sumer. Auquel nous devons prêter grande attention, il serait mauvais pour le Decret de Secret Magique qu’un moldu puisse s’en approcher de trop près. Sur tous ces vestiges, nous observons des formules. Qui peut me traduire celle-ci ?

Un autre élève traduit la formule et Link écrivit consciencieusement la réponse, se dépêchant de croquer les runes étranges au passage. Le muet appréciait particulièrement d'étudier les runes akkadienne, sumériennes ou les hiéroglyphes. C'était toujours passionnant. Vint ensuite l'un des moments préférés de Link dans le cours : la pratique. Il se dépêcha de recopier les deux textes, tout en s'appliquant, et sortit un autre trousse de son sac, ou tout un attirail moldu l'attendait. Pendant une bonne dizaine de minutes, sur son parchemin Link entoura, encadra, souligna de bleu, de rouge, de vert et d'autres couleurs les diverses runes qu'il trouvait similaires effectuant des grimaces, tirant la langue de temps en temps comme il le faisait enfant, quand il dessinait sur le parquet de sa chambre en France. Il finit bien avant ses camarades, le sourire au lèvre puis attendit que la suite du cours se déroule.

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