La fameuse Gare de King's Cross... Autant que je m'en souvienne, cet endroit avait toujours été un endroit à problèmes. Pourquoi ? Deux mots : La foule. J'y ai toujours été en période d'affluence, surtout avant Noël, et ça fait un vacarme pas possible dans ma tête.

Boum. L'inévitable venait d'arriver : J'avais percuté quelqu'un.

- Oh pardon, je suis désolé, je vous avais pas vu... Vous allez bien ?, bafouillais-je.

- Euh oui ça va, ne vous excusez pas, je ne regardais pas devant moi ... Ah ! Mais vous allez bien ?
- Oui oui, je vais bien..., mentis-je.

Bien ? Comment pouvais-je aller bien avec tout ces bruits, ces odeurs et ses mouvements qui se mélangeaient dans ma tête ? J'avais l'impression que mon cerveau était devenu un mixeur à fruit ! Je ne savais plus ou donner la tête.

- Enfin... plus ou moins, avouais-je en me frottant l’extrémité du sourcil avec deux doigts

Une alarme qui annonçait le départ d'un train me tira une grimace et résonna dans ma boite crânienne. La goutte d'eau qui faisait déborder le vase.

- Ok, en fait je vais carrément pas bien. C'est où la sortie ?!

Je sentis une main m’agripper le bras et m'entrainer subitement entre la foule. Je bousculais au passage certaines personnes, ne sachant pas vraiment où mettre le pieds.

- Ça va ? Vous arrivez à marcher ? Vous ... Vous êtes aveugle ??
- Sortie d'abord ! Discussion après !

Ce n'est pas que je voulais être impoli, mais j'étais dans un état tel que je n'arrivais plus à réfléchir correctement. La jeune demoiselle m'entraina jusqu'à un banc à l’extérieur de la gare dont je m'affala dessus.

- Fiou ! J'ai cru que j'allais y passer !, disais-je en tentant de retrouver ma respiration. Merci, tu m'as vraiment sauvé la mise !, poursuivais-je en passant au tutoiement très naturellement.

- Tu devrais te calmer, disait-elle d'un ton détendu. J'ai eu peur que tu me claque entre les doigts !

Je me joignis à son petit rire, pensant que effectivement j'en étais pas loin, enfin c'est l'impression que j'en avais tout du moins.

- Alors ? Un problème avec la foule ?, me demandait-elle

Je respire un bon coup, sentant que mon cœur s'était enfin calmé.

- En quelque-sorte. Comme tu l'as deviné tout à l'heure, je suis effectivement aveugle. Et crois-moi, quand on est confronté à une masse de gens pareille, ça peut provoquer un mal de crâne carabiné !, disais-je, amusé.

-Je te comprend... Déjà que je n'aime pas être au beau milieu d'une foule, je ne peux qu'imaginer ce que ce serait si je ne pouvais pas la voir...

J'approuvais d'un léger hochement de tête, ne pouvant qu'être d'accord. C'était vraiment un calvaire. J'entendis même la jeune fille se secouer la tête comme si elle était prise de révulsion, ce qui me tira un bref rire.

- Enfin, je pense ne pas me tromper en disant que, à t'entendre, tu vas déjà beaucoup mieux ! Que faisais tu ici en plein milieu de tout ce monde si tu n'aime pas t'y retrouver ? Enfin, si ce n'est pas indiscret.

Je m'apprêtais à répondre lorsque je la sentis s'asseoir à côté de moi et poser sa main sur ma cuisse, me faisant sursauter.

- Euh je... hum... Enfin... C'est-à-dire que... En fait..., bégayais-je avant d'essayer de me reprendre, légèrement perturbé. Je pensais passer mes vacances de Noël avec ma famille pour une fois, mais il semblerait qu'elles ne soient pas encore là. J'avais juste pas pensé que beaucoup de monde aurait eu la même idée que moi..., disais-je accompagné d'un petit rire nerveux. Et toi ?

- Et bien, j'étais venue voir mon père quelques instants avant qu'il ne reparte. Comme je suis à Poudlard, il n'y a que pendant les vacances que je peux le voir et ... il est en déplacement. Donc je suis venue pour passer au moins quelques minutes avec lui. Son train venait de partir quand je t'ai percuté !

Poudlard ? Elle avait bien dit Poudlard ?! Oh, mais alors c'était une sorcière ! Comme moi ! Et moi qui la prenait pour une moldue ! C'était déjà bien plus intéressant !

- Oh, tu es à Poudlard ! J'y étais aussi, jusqu'à l'année dernière ! Tu es en quelle année ? Quelle maison ? Ah, et tu t'appelles comment en fait ? Moi c'est Damien ! Damien Throwback !, disais-je, enjoué, en lui tendant la main.

- Gryffondor ! répondit-elle en soupirant, semblant être soulagée.

Pourquoi avait-elle soupiré ? Est-ce qu'elle était plus rassurée en présence d'un sorcier que d'un moldu ? Étrange... M'enfin, inutile de débattre pendant des siècles non plus.

- Et je suis en cinquième année ! C'est marrant, je ne me rappelle pas t'avoir déjà croisé ... Enfin il y a tellement de monde dans cette école que ce n'est pas si bizarre après tout ... Oh, désolée, moi c'est Shae Marsh. Enchantée Damien ! Et toi, dans quelle maison tu étais ? Et qu'est ce que tu fais maintenant que tu as quitté l'école ? Vers quoi tu t'es dirigé ?

J'arborais un sourire empli de fierté et bomba excessivement le torse pour feindre l'égo démesuré.

- J'étais dans la prestigieuse maison de Poufsouffle ! Et tu as devant toi un futur Auror, jeune Shae ! Alors gaffe à toi si tu fais des bêtises après l'école !

Après cette prestation très théâtralisée, voir parodique, je ne pu m’empêcher de partir dans un fou rire hilare.

- Apprenti Auror ! Ça doit être vraiment chouette ! Si je n'avais vraiment tenu à faire médicomage, je pense que j'aurais fait Auror ! J'aime à savoir que je pourrais être utile aux gens qui m'entourent. Soit en les protégeant, soit en les soignant ! Mais je dois honorer la promesse que je me suis faite alors ce sera médicomage ! Et puis ce n'est pas comme si je n'avais pas réellement envie de faire ce métier là ! Mais s'il n'avait existé, j'aurais été Auror ! Et je vais m'arrêter de parler là parce que ... je commence à me répéter ... Désolée, cette conversation me plaît et j'ai du mal à contenir mon enthousiasme ... Et bah me voilà en train de parler comme une vieille personne à mon tour ... Ou comme dans un roman, comme tu préfères.

J'émis un long sifflement d'admiration avant d'exploser de rire à nouveau. "A mon tour" ? Est-ce que ça insinuait que moi aussi je parlais comme un vieux ? Pourquoi est-ce que mes cheveux blanc avaient tendance à me vieillir ?

- Médicomage ? Impressionnant ! C'est pas tout le monde qui aurait la volonté de faire pareil métier. En tout cas je te souhaite bonne chance !

- Merci, c'est très gentil. Dis moi, est ce que tu as déjà fait des missions en temps qu'apprenti Auror ou tu es encore trop inexpérimenté pour être envoyé sur le terrain ?

Un soupir s'échappa de ma gorge, feignant -à moitié seulement- le désespoir.

- Eh non, malheureusement les missions sur le terrain sont réservées aux deuxièmes années, et je ne suis qu'en première. Même si on à déjà fait des séances d'entrainement au combat, et c'était génial ! Mais l'année prochaine, je vais pouvoir faire mes preuves !

Soudain, un frisson me traversa le dos jusqu'au sommet du crâne. Une voix. Une odeur. Un souvenir.

-... Même si ça risque de pas être de la tarte à la citrouille avec l'Auror titulaire qu'on m'a attribué...

- Qui est ton titulaire ? Il est exigeant ou juste sadique ? Parce que s'il est exigeant, c'est tant mieux non ? Tu n'en seras que meilleur une fois lâché dans la nature, non ?

Un sourire narquois se dessina sur mes lèvres en entendant ses mots. "Il" ?

- Tout d'abord c'est une femme... Une fille ? Je sais pas trop, elle m'avait l'air jeune... Et elle s'appeeelle... Cho... Cha... Chae You...

Je me frottais le bout du sourcil avec le majeur, signe d'une intense réflexion mué dans le silence.

- Chae Yeon Jin ! Quelque-chose comme ça... Ça te dit quelque-chose ?

Me doutant de la réponse, je poursuivit.

- Enfin bref... Je ne sais pas si c'est du sadisme ou juste si elle est exigeante, je ne l'ai rencontrée qu'une fois, mais elle m'avait l'air... glaciale quand elle me parlait. Comme si j'avais une tête qui ne lui revenait pas.

Je ponctuais ces derniers mots en me frottant le crâne, ébouriffant au passage mes cheveux blancs. Soudain, je remarquais l'odeur qui me chatouillait les narines depuis tout à l'heure et dont je n'avais pas fait attention.

- ...C'est du parfum que je sens ? C'est quoi ?

- Hmm ... Je ne pense pas que ce soit du sadisme dans ce cas. Je pense qu'elle veut prendre le temps de t'évaluer, de voir à qui elle a affaire. Si j'étais elle, j'en ferais de même. C'est une façon de voir si tu vaut le coup, de ne pas partir tout de suite en se disant que tu seras le meilleur de ses élèves, de ne pas être déçu ... Oui, je pense qu'elle regarde si, selon elle, tu fera un bon Auror ou si elle perd son temps avec toi. Beaucoup de gens sont réservés à la première approche. C'est comme lors d'un combat ! Les premières minutes sont celles pendant lesquelles on essaye de comprendre son adversaire, on l'analyse pour savoir sa technique, ses faiblesses, ses points forts ... Tu comprends ? Je pense qu'elle se détendra au fur et à mesure que tu lui montreras qu'elle peut avoir confiance en toi !

Je l'écoutais sans un mot, sans sourciller, laissant ses mots décanter dans ma tête et réfléchir. Elle n'avait pas tord dans un sens. Peut-être était-elle ce genre de fille. Mais je n'avais toujours pas la réponse pour son odeur qui me titillait.

- Euhm et bien j'ai mis du parfum ce matin mais ... je doute que ce soit ça parce que, depuis, il a eu le temps de s'estomper. Peut être quelqu'un qui est passé pas loin et qui avait mit la dose ?

Je m'apprêtais à secouer la tête mais je me retins au dernier moment. Si ce n'était pas du parfum -étant donné que ce n'était certainement pas quelqu'un qui passait par là-, mieux valait ne pas l'inquiéter avec une information vague.

- Hum, t'as peut-être raison... Dans les deux cas, j'veux dire.

Toujours aucun signe de ma famille, je fouilla alors dans ma sacoche et y sortit une tablette de chocolat que je tendais -approximativement- vers Shae.

- Chocolat ?

- Non merci, je ne pourrais avaler quoi que ce soit !

Je haussais les épaules et entama un carré.

- Tu attends quelqu'un ou tu repars seul ? Je ne vais pas tarder à aller sur le quai du train, il ne faudrait pas qu'il parte sans moi ou je serais bien embêtée !
- Oh oui pardon, j'avais pas fait attention à l'heure ! J'aimais bien nôtre conversation...

Soudain, j'entendis des bruits de pas familiers, et une voix lointaine que je reconnu. Impossible de ne pas reconnaitre ma famille.

- Ah bah tiens, en parlant du loup, les voilà. Donc je vais te laisser. J'espère te recroiser à nouveau, Shae. Portes-toi bien et joyeux noël !, dis-je dans un grand sourire avant de faire un signe de la main et de m'éloigner.